mercredi 26 octobre 2016
À l’heure où certains remettent en cause l’utilité des partenaires sociaux et du dialogue social, il n’est pas inutile de revenir aux réalités de leurs résultats. Depuis plus de 15 ans, la négociation a pris une place nouvelle en France, après les lois Auroux sur la négociation annuelle obligatoire (NAO), et à la suite des lois Aubry sur le temps de travail et la possibilité de mandatement.
Le nombre d’accords est passé de 6 800 accords en 1987 à 37 800 en 2015 (données provisoires), un nombre élevé et un peu supérieur à l’année précédente (2014). La négociation collective est donc active en France et très implantée dans les relations du travail. Les signataires des accords révèlent des surprises.
Les chiffres
Les accords en 2015 | 2015 | 2014 |
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Accords et avenants interprofessionnels | 52 | 28 |
Accords et avenants de branches | 1 042 | 1 006 |
Accords d’entreprise | 36 600 | 36 500 |
Ces chiffres montrent bien l’étendue de la négociation dans les entreprises.
– C’est notamment la négociation interprofessionnelle qui s’est dynamisée en 2015, avec de nombreux avenants et surtout 5 ANI [1] (2 en 2014, 5 en 2013) sur le FPSPP (Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels), le contrat de sécurisation professionnelle (2 conventions), la mise en œuvre de la loi sur la formation continue, l’emploi et la démocratie sociale, les retraites complémentaires.
– Les accords de branche ont connu une légère augmentation (+4 %), tout en étant loin des années 2009-2012 où 1 300 accords étaient signés chaque année. Il y a eu cependant 38 accords nouveaux (31 en 2014) et 5 conventions collectives nouvelles (2 en 2014). Les thèmes de négociation ont évolué, tout en gardant une première place aux salaires, mais en retrait. Progressent au contraire les accords sur la négociation et le dialogue social, la formation professionnelle (CPNEFP [2] et priorités de la formation dans la branche), les frais de santé et la prévoyance en raison du caractère obligatoire de cette protection sociale complémentaire.
Les thèmes des accords de branche | 2015 | 2014 |
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Salaires | 375 | 402 |
Conditions du dialogue social | 264 | 224 |
Formation professionnelle | 232 | 201 |
Protection sociale complémentaire | 232 | 198 |
Contrat de travail | 207 | 162 |
Condition d’application des accords | 175 | 174 |
Égalité professionnelle | 166 | 136 |
Système et relèvement de primes | 142 | 163 |
Maladie | 136 | 86 |
Temps de travail | 60 | 106 |
– Au niveau des entreprises
Le chiffre est quasi semblable à celui de l’année précédente, mais ces accords ne représentent qu’une partie des textes discutés (61 000) dont des décisions unilatérales et plans d’action. Salaires et primes sont le thème le plus discuté avec 38 % des accords en raison de la NAO, soit près de 14 000, en recul cependant de 2 points en raison de la situation économique et de la faible inflation. L’aménagement du temps de travail a connu une progression en 2015 (5 600 textes, +11 %) ; 2 554 accords ont été signés sur la retraite complémentaire et la prévoyance ; l’égalité professionnelle est en hausse (166 accords, +22 %), en partie liée au rythme de renouvellement des accords tous les 3 ans ; au contraire il y a peu d’accords sur la formation (moins de 500 accords), un recul sur la couverture complémentaire, les contrats de génération.
Qui signe ?
C‘est une analyse intéressante que de voir quels sont les signataires des accords aux différents niveaux de la négociation.
Signataires des accords interprofessionnels et de branches (en %) | Signataires des accords d’entreprises par les organisations représentatives présentes (en %) | |
---|---|---|
CGT | 34,9 | 84 |
CFDT | 86,4 | 94 |
FO | 68 | 90 |
CFTC | 75 | 89 |
CGC | 72,9 | 92 |
UNSA | 87 | |
Solidaires | 69 |
Ce tableau montre la différence de propension à signer des différents syndicats. Cette différence est très forte au niveau national. Au contraire, les différences, si elles existent cependant, s’estompent beaucoup au niveau des signatures dans les entreprises.
Vu ces chiffres des accords signés, on peut s’étonner que le développement des accords d’entreprise ait été défini comme un « casus belli » dans la loi Travail. Sauf à penser que ces organisations considèrent leurs négociateurs d’entreprises comme trop ouverts à des mesures peu favorables aux salariés, ce qu’ils ne font sûrement pas, on peut s’étonner de l’opposition au développement des négociations d’entreprises où leurs négociateurs semblent trouver leur compte – celui des salariés – ou des compromis acceptables, alors qu’elles ne trouvent pas beaucoup d’accords de branche qui les satisfont et qu’elles signent.
[1] Accord national interprofessionnel
[2] Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation professionnelle