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Dématérialisation et inégalités d’accès au service public : les rappels du Défenseur des droits

samedi 23 mars 2019

Comme le garantissent la Constitution et la loi organique du 29 mars 2011, le Défenseur des droits veille au respect des droits et libertés des usagers par toutes les administrations. À ce titre, tout en soulignant l’intérêt de la dématérialisation des démarches pour les citoyens et les administrations, son dernier rapport relève un certain nombre de difficultés et de risques et propose une série de recommandations.

La dématérialisation : un sujet de préoccupation dès 2013

Dès l’annonce du « choc de simplification » des démarches administratives par le Gouvernement en 2013, la question de la numérisation des services publics a commencé à apparaître comme un sujet de préoccupation. Le Défenseur a reçu plusieurs milliers de réclamations par exemple sur le processus de dématérialisation de la délivrance des permis de conduire et des certificats d’immatriculation.

La nouveauté d’ « Action publique 2022 »

Au travers d’« Action Publique 2022 », le Gouvernement souhaite améliorer la qualité de service pour les usagers en développant notamment la relation de confiance entre les usagers et les administrations. Le programme repose sur six principes clés, dont celui de la priorité donnée à la transformation numérique des administrations, avec pour objectif la dématérialisation de l’intégralité des services publics à horizon 2022.

Pour le Défenseur des droits, la possibilité de réaliser un certain nombre de démarches administratives en ligne représente non seulement une source d’économies pour l’administration, mais également une source de bénéfices pour les usagers. Cette transformation peut faciliter l’accès à l’information, constituer un progrès pour l’accès aux droits quand elle s’accompagne de démarches de simplification et d’automatisation et notamment favoriser la lutte contre le non-recours. À titre d’exemple, la dématérialisation du revenu de solidarité active (RSA) a permis une hausse de 2 % des bénéficiaires.

Ce que n’est pas la dématérialisation

Mais la dématérialisation ne sert pas à pallier la disparition des services publics ni à privilégier une approche budgétaire et comptable. De même, cette transformation profonde ne peut se faire à « marche forcée », sans tenir compte des difficultés bien réelles d’une partie de la population et des besoins spécifiques de certaines catégories d’usagers.

Enfin cette opération ne doit pas aboutir à une déresponsabilisation des pouvoirs publics, en renvoyant notamment à la sphère associative la prise en charge de l’accompagnement des usagers.

Trois principes fondateurs du service public à respecter, rappelle le Défenseur

  • Le principe de continuité du service public.
  • Le principe de l’égalité devant le service public.
  • Le principe d’adaptabilité ou de mutabilité.

Et des recommandations à adopter

  • Conserver toujours plusieurs modalités d’accès aux services publics.
  • Prendre en compte les difficultés pour les usagers en créant une clause de protection des usagers en cas de problème technique leur permettant de ne pas être considérés comme responsables du non-aboutissement de la démarche.
  • Instaurer le principe de l’envoi sous forme papier des notifications d’attribution, de suppression ou de révision de droits comportant des délais et des voies de recours.
  • Garantir un délai permettant de faire des rectifications dans le cadre d’une démarche administrative dématérialisée.
  • Prévoir des exceptions juridiques aux obligations de paiement dématérialisé imposées par la réglementation.
  • Repérer et accompagner les personnes en difficulté avec le numérique.
  • Évaluer systématiquement les besoins d’accompagnement liés aux projets de dématérialisation, prévoir les moyens dédiés et expliciter les mesures prises ou à prendre pour y faire face.
  • Redéployer une partie des économies procurées par la dématérialisation des services publics vers la mise en place de dispositifs pérennes d’accompagnement des usagers.
  • Instaurer un service public de proximité réunissant un représentant de chaque organisme social, des impôts, de Pôle emploi, un travailleur social ainsi qu’un médiateur numérique pour réaliser un accompagnement généraliste et de qualité de la population, en particulier la plus fragile.
  • Former les accompagnateurs et les volontaires du service civique à l’accueil des publics fragiles et mobiliser ces volontaires non pour remplacer les agents d’accueil mais en complément de la mobilisation des agents de l’organisme qui dématérialise des procédures.
  • Prendre en compte les publics spécifiques comme les personnes privées de leur liberté, les personnes handicapées…
En conclusion, le Défenseur des droits rappelle qu’un service public dématérialisé reste un service public avec tout ce que cela impose de contraintes pour respecter les droits de manière égale sur l’ensemble du territoire et pour toutes les catégories de population. Enfin, pour bénéficier à tous et à toutes, la dématérialisation des services publics devra constituer un investissement massif pour notre pays, pour l’État, bien sûr, mais également pour l’ensemble des acteurs du service public et pour les usagers qui devront s’y adapter. Une conclusion bienvenue !

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