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Directive CSRD : nouvelles obligations d’informations extra-financières pour les entreprises

mercredi 14 février 2024

Depuis le 1er janvier 2024 est applicable la directive européenne CSRD [1] qui impose des normes de rapport extra-financier aux entreprises afin d’obtenir une meilleure transparence d’informations sur leurs efforts de « durabilité », c’est-à-dire donner la capacité d’évaluer l’impact de leurs activités selon des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) et leurs efforts de transition écologique. Cette directive est essentielle car, jusqu’à présent, les informations environnementales des entreprises restent très lacunaires [2] .

L’objectif

Les très grandes entreprises devaient déjà produire un reporting extra-financier depuis une première directive de 2014. Mais elle ne concernait que les entreprises ayant plus de 500 salariés, un chiffre d’affaires (CA) de plus de 40 millions d’euros et un bilan de plus de 20 millions d’euros. La nouvelle directive veut aller plus loin, dans le cadre du Pacte vert européen, vers un futur durable et juste, et amener les entreprises à transformer leur stratégie économique et sociale. Elle concernera 50 000 entreprises.

« Les nouvelles règles garantiront que les investisseurs et autres parties prenantes auront accès aux informations dont ils ont besoin pour évaluer l’impact des entreprises sur les personnes et l’environnement et évaluer les risques et opportunités financiers découlant du changement climatique et d’autres questions de durabilité », précise la Commission européenne, ce qui est analysé comme une « double matérialité ». Ainsi la directive crée un langage commun aux entreprises européennes, permettant la comparaison.



Une application progressive

Elle s’appliquera d’année en année selon la taille des entreprises :
 au 1er janvier 2024 pour les très grandes entreprises qui déjà dépendaient de la directive de 2014, avec un premier reporting nouvelle formule en 2025 sur leurs données de 2024,
 au 1er janvier 2025 pour les grandes entreprises qui réalisent 2 des 3 critères : 250 salariés, 50 millions de chiffre d’affaires et 25 millions de bilan, avec un premier reporting en 2026,
 au 1er janvier 2026 pour les entreprises moyennes, qui ont entre 50 et 250 salariés, un CA entre 900 000 € et 50 millions et un bilan entre 450 000 € et 25 millions, avec un premier reporting en 2027,
 au 1er janvier 2028 pour certaines entreprises non européennes ayant un CA européen supérieur à 150 millions d’€ ou une filiale dans l’UE.

12 normes globales, environnementales, sociales et de gouvernance

À part 2 normes très générales (principes généraux et informations générales), une norme de gouvernance concerne la gestion des affaires, 9 normes se consacrent à l’environnement et au social.
 Pour l’environnement, les informations devront concerner le climat, la pollution, l’eau et les ressources marines, la biodiversité et les écosystèmes (facteurs impactant directement la biodiversité, impact sur l’état des espèces, sur la préservation des écosystèmes, et sur les systèmes écosystémiques), l’utilisation des ressources et l’économie circulaire ;
 Sur le social, il s’agira de fournir des informations précises sur la main d’œuvre propre à l’entreprise (conditions de travail, égalité de traitement, formation, harcèlement au travail…), les travailleurs de la chaine de valeur, les communautés affectées, les utilisateurs et consommateurs finaux.
Des guides sont ou vont être publiés sur chacune de ces normes pour que les entreprises puissent préparer leur reporting. Et des normes sectorielles devraient s’ajouter quand elles seront définies.

La Commission européenne a mis finalement 2 bémols, devant certaines réticences des entreprises et de politiques (en particulier 40 eurodéputés allemands et tchèques). D’une part, les seuils mentionnés plus haut sont des seuils relevés de 25 %, ce qui va exempter un certain nombre d’entreprises de cette obligation de reporting. D’autre part, le traitement des 12 sujets ne sera pas obligatoire, si l’une ou l’autre des normes peut être qualifiée de « non pertinente » par une entreprise par rapport à ses réalités…



2 changements à prendre en compte

D’une part, ce nouveau travail exige des compétences que beaucoup d’entreprises n’ont pas. Ainsi, des besoins de compétences et des recrutements vont se développer dès cette année. Novethic cite ainsi 5 métiers qui vont être recrutés en 2024 : chef de projet CSRD et performance globale, administrateur de la transformation durable, responsable des ressources humaines RSE, chargé de mission biodiversité et ressources naturelles, analyste des données durables avec utilisation de l’intelligence artificielle (IA). Mais c’est aussi la formation des personnels des entreprises qu’il faut organiser vu les transformations de leurs métiers et fonctions que cela devrait engendrer.

Mais aussi ces informations extra-financières doivent permettre une connaissance plus précise et des interventions pour les représentants du personnel, à commencer au CSE pour une meilleure mise en application de la loi Climat et Résilience sur les nouvelles compétences du CSE en matière d’environnement et transition écologique, voire des négociations pour un dialogue social intégré au vécu de l’entreprise sur ces questions et leurs répercussions sur les salariés (métiers, conditions de travail, parcours professionnels, etc.). D’autant plus que la France a vite transposé la directive par une ordonnance du 7 décembre 2023 qui organise la fonction d’« auditeur vert » (commissaires aux comptes ; ou bien experts comptables et avocats sous condition d’une formation de 90 heures et d’un agrément) afin que les premières entreprises françaises puissent préparer leur reporting pour 2025.


Références


Notes :

[1CSRD : Corporate Sustainability Reporting Directive, directive de reporting sur la durabilité