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Formation professionnelle : un nouveau rapport

jeudi 10 mai 2012

Une Nième proposition de réforme de la formation professionnelle avait été demandée à Gérard Larcher, sénateur, ancien ministre du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle. Il a remis son rapport, début avril. Cela invite surtout à se pencher sur l’état de la formation professionnelle aujourd’hui.

Quelques flashs sur l’état de la formation aujourd’hui

 La formation professionnelle reste un panorama toujours aussi complexe.

Elle représente 31 milliards d’euros, avec plusieurs financeurs, pour les différents publics :

 Les entreprises, qui financent la formation des salariés pour 13 milliards d’euros, par le plan de formation pour les besoins de l’entreprise en compétences, le maintien de l’employabilité des salariés, par le biais du CIF pour les choix individuels, et par l’alternance pour les contrats d’apprentissage, et de professionnalisation des jeunes et des adultes.

 Les régions, qui ont la responsabilité et financent la formation de jeunes sans emploi sortis du système scolaire sans qualification et de demandeurs d’emploi, pour 4,5 milliards.

 L’État, qui finance pour 3 milliards la formation continue de ses agents et pour 5 milliards l’apprentissage des jeunes (exonérations), l’insertion des jeunes en difficulté (missions locales et PAIO), quelques pans de la formation des demandeurs d’emploi, et la formation continue dans l’enseignement supérieur pour les salariés.

 L’UNEDIC et Pôle emploi qui financent la formation des demandeurs d’emploi indemnisés (1,5 milliard).

 Sont aussi financeurs les autres collectivités territoriales (2,5 milliards pour leurs agents), les autres administrations (0,2 milliard).

 Les individus, enfin, quand ils décident et financent seuls une formation qu’ils souhaitent suivre (1,1 milliard).

Ainsi on trouve de multiples financeurs, agissant chacun sur plusieurs publics, des financements croisés, et de nombreux opérateurs : c’est de plus en plus un enchevêtrement ! Donc un ensemble que peu de salariés maîtrisent, savent utiliser, en dehors du réseau des professionnels.

 L’accès à la formation est toujours très inégal

selon la catégorie professionnelle. Les ingénieurs et cadres ont un taux d’accès moyen de 58,6 % quand ce taux s’établit à 36 % pour les ouvriers. De même, la taille de l’entreprise, et dans une moindre mesure le sexe, interviennent très fortement : 63,4 % des hommes et 58,9 % des femmes travaillant dans une grande entreprise de 2000 salariés et plus ont accédé à une formation en 2009. Ils ne sont que 15,6 % pour les hommes et 18,4 % pour les femmes dans les entreprises de 10 à 19 salariés.

 Un faible accès à la formation pour les demandeurs d’emploi.

En 2010, 600 000 demandeurs d’emploi ont suivi une formation (+ 15 % par rapport à 2009), soit environ 9 % des demandeurs d’emploi : un nombre identique à 2007, alors que le chômage a beaucoup cru ! Les femmes représentent la moitié des formés, les jeunes 43 %, les 26-45 ans 42 %, les plus de 45 ans 15 %. Les 680 000 stages ont été financés à 57 % par les régions, dont la moitié pour des jeunes en insertion, à 17 % par Pôle emploi, à 13 % par l’État, le reste étant financé par les stagiaires (6 %), l’ AGEFIPH, les OPCA, OPACIF et autres collectivités. Ces formations ont duré en moyenne 4,7 mois. Et 91 % des stagiaires étaient rémunérés pendant leur formation par Pôle emploi, les Régions ou l’État). Donc une proportion faible.

D’autre part, la politique d’achat de formations de Pôle emploi est évaluée par l’Inspection générale des affaires sociales comme insuffisamment efficace par sa rigidité, avec des commandes ne reposant quelque fois sur aucun besoin, des formations trop hétérogènes et un outillage de prescription trop artisanal.

 Une conception assez traditionnelle de la formation.

Une enquête (Observatoire Cegos) sur la formation professionnelle dans 6 pays européens (Allemagne, Espagne France, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni) montre que si les Français sont assez satisfaits des formations suivies, ils en attendent moins que dans les autres pays en termes d’évolution professionnelle. Elle révèle aussi que la France est le pays où les formations gardent le plus le modèle traditionnel de la formation en groupe présentiel et utilisent le moins l’accompagnement, le tutorat, le coaching, la formation à distance et les formules mixtes.

 Un développement limité du DIF

En 2010, seuls 6,5 % (5 % en 2007, 6 % en 2009) des salariés ont utilisé leur DIF, avec une durée moyenne de 23 heures, à 80 % pendant le temps de travail. Comme les heures de DIF peuvent se cumuler sur 6 ans, en fait seulement 3 % du stock d’heures (de 500 millions d’heures) a été consommé. Là aussi, une proportion faible, mais en léger progrès.

 Le fonctionnement de la formation professionnelle reste toujours trop piloté par l’offre.

Issue de 15 500 organismes de toute nature, de toute taille, privé lucratif ou non lucratif, public ou parapublic, l’offre est fragmentée, de qualité variable, parfois inadaptée à la demande et pas assez innovante en termes pédagogiques, ainsi que le souligne l’avis du CESE (conseil économique, social et environnemental) de décembre 2011.

On a ainsi une énorme dépense collective, qui est pourtant loin de répondre à tous les besoins des personnes et des entreprises. On peut donc poser légitimement la question de l’efficacité de la dépense, de la recherche de sa meilleure optimisation et d’une meilleure réponse aux enjeux actuels, …afin de donner une réalité plus concrète à l’objectif, si souvent affirmé, de formation tout au long de la vie.

Les grands enjeux d’une réforme de la formation professionnelle

On peut déterminer 4 objectifs prioritaires à la formation professionnelle :

 Les besoins en compétences des entreprises et administrations pour assurer leurs activités de production ou de services, l’innovation, leur développement, la mission des services publics.

 Les besoins des salariés pour assurer leur employabilité, et aussi pour progresser en qualification : l’accord national interprofessionnel de janvier 2009 n’affirme-t-il pas le droit pour tout salarié de progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle !

 La (re)qualification et la (ré)insertion professionnelle des demandeurs d’emploi, jeunes et adultes.

 Une gouvernance claire et efficace de l’ensemble. Or les éléments de bilan montrent qu’on est loin de remplir ces objectifs : la plupart des demandeurs d’emploi attendent au moins 6 mois avant qu’on leur propose une formation, le budget formation dans les entreprises s’est réduit au cours des années 2000, et si un nombre important des salariés va en formation dans l’année (42 %), ces formations sont de plus en plus courtes et sont loin d’apporter une consolidation et un développement suffisants des compétences, des capacités de progression professionnelle et d’innovation. Enfin, les PME versent aux OPCA des ressources dont une part est utilisée par les grandes entreprises, qui font davantage de formation que les premières.

Pourtant, depuis les années 2000, les rapports sur ces questions ont été multipliés et jusqu’ici, ils s’empilent. Le rapport Larcher est le dernier en date. Qu’en restera-t-il ? Le nouveau pouvoir se saisira-t-il de cette question, ou laissera-t-il le temps d’évaluer la mise en œuvre de la loi de 2009 et aux partenaires sociaux de procéder au bilan de leur accord de janvier 2009 prévu 5 ans après, soit début 2014 ?

Ce nouvel état des lieux constitue ainsi une mise à jour des articles de référence déjà parus sur clés du social :

Formation professionnelle continue, état des lieux
Accord sur la formation professionnelle : un contour limité
Formation continue : après l’accord, la loi