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Les effets de l’intelligence artificielle sur le travail

samedi 20 janvier 2024

L’intelligence artificielle est maintenant implantée ou prévue dans une partie des entreprises voire des services publics si bien que ses impacts sur le travail commencent à pouvoir être observés et analysés. Pour cela, LaborIA, laboratoire commun entre le ministère du Travail et l’Inria (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique), avec l’institut Matrice, a interrogé en 2022 250 décideurs d’entreprises et organisations publiques de plus de 50 salariés et a publié récemment les premiers résultats, tout en prenant des précautions sur la difficulté de tirer des conclusions à partir d’un nombre limité de répondants.

L’intelligence artificielle (IA) : laquelle et où la trouve-t-on ?

Les prévisions quantitatives sur l’emploi ne sont pas abordées dans cette enquête, d’ailleurs les prospectives publiées jusqu’ici sont très variables. Citons seulement l’Ocde qui estime que dans les 20 prochaines années 14 % des emplois pourraient avoir disparu et près d’un tiers avoir changé radicalement.

21 % des personnes interrogées disent avoir un système d’intelligence artificielle (SIA) opérationnel ou en projet. Cette enquête montre aussi que l’IA est d’autant plus présente que l’entreprise est grande, et qu’on la trouve en premier dans le secteur industriel (27 %) bien plus que les administrations (13 %). En fait, plus on a l’habitude du numérique ou de l’automatisation, plus on est en avance pour l’utilisation de l’IA.

Les SIA les plus utilisés sont de loin ceux de détection des défauts et anomalies (35 %), devant les machines autonomes (19 %), les chatbots (logiciels qui dialoguent avec des interlocuteurs) et callbots (assistants vocaux qui gèrent les appels téléphoniques de manière automatisée) à 16 %, ceux utilisant la vision (11 %) et les SIA linguistiques (traductions…, 5 %) ou ceux d’aides à la décision.

Premiers résultats sur les effets de l’IA sur le travail

Il faut d’abord remarquer que le ressenti est bien plus positif chez ceux qui utilisent déjà l’intelligence artificielle que chez les non-utilisateurs : respectivement 90 % contre 48 % pour l’impact positif !

Les 3 principales raisons d’introduction d’un SIA sont la volonté de diminuer les risques d’erreurs (85 %), d’améliorer les performances des salariés (75 %) et de restreindre les tâches fastidieuses (74 %). Les PME y ajoutent l’amélioration de la santé-sécurité des salariés (23 %).

Au contraire les freins au déploiement viennent essentiellement du manque de compétences en interne (37 %) et de la compatibilité avec les outils existants (38 %), mais aussi du coût de l’investissement (32 %).

Les impacts ressentis sont sur : l’autonomie, en premier (72 % des utilisateurs) et l’évolution des savoir-faire (68 %), devant la responsabilisation des salariés (54 %), le sens donné au travail (47 %) et les relations interpersonnelles (29 %). Les répondants industriels mettent l’accent sur l’autonomie, les entreprises de 50 à 249 salariés sur le sens donné au travail, les plus grandes sur l’évolution des savoir-faire.

Ce qui est frappant c’est que les non-utilisateurs s’attendent à des impacts plus importants que n’en ressentent ceux qui s’en servent déjà. Ils sont plus sensibles aux menaces de l’IA et en particulier ils expriment des craintes sur l’impact de l’IA sur les relations interpersonnelles. En fait, au fur et à mesure du déploiement et de l’appropriation de l’outil, les utilisateurs l’intègrent et l’adaptent à leur poste.

En conclusion provisoire

En fait, les effets sur le travail dépendent beaucoup de la façon dont les entreprises et administrations vont introduire l’intelligence artificielle, de leurs choix d’organisation, misant soit sur une automatisation poussée soit sur une complémentarité humain-machine. C’est en fonction de ces choix qu’il y aura des conséquences positives ou négatives sur les qualifications, sur le travail en équipe ou l’isolement de chacun, sur l’autonomie et sur la pénibilité, la charge mentale et le traitement des tâches routinières. Il est donc essentiel d’en anticiper les effets, les besoins de compétences et la sécurisation des parcours professionnels pour les salariés qui seront impactés. Une préoccupation à développer pour les élus du personnel et les syndicats. Il est d’ailleurs dommage que l’enquête n’ait été faite qu’auprès des décideurs. Il sera fondamental d’avoir le ressenti des salariés car ce sont eux qui s’en servent réellement, aujourd’hui ou demain.


Références