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Responsabilité juridique du siège

jeudi 3 novembre 2011

Jurisprudence : une nouvelle tendance, remonter la responsabilité juridique de la filiale au siège.

La chambre sociale de la Cour de Cassation a pris le 18 Janvier 2011 un arrêt qui fait date.

Dans le passé en effet, toutes les décisions partaient du principe de l’entité disjointe entre filiales et entreprise-mère et de leur autonomie. Des arrêts antérieurs avaient refusé aux salariés licenciés d’appliquer le concept de coemployeur entre leur employeur direct - la filiale - et la maison-mère qu’ils accusaient pourtant de prendre les décisions stratégiques et d’avoir imposé à la filiale ces licenciements.

L’arrêt du 18 janvier renverse la tendance et applique le qualificatif de coemployeur, ce qui transmet une partie de la responsabilité à la société-mère, aux cas où la dépendance dans les décisions stratégiques, la gestion des ressources humaines, ainsi que la confusion d’intérêts sont avérés.

Il s’agit d’une entreprise normande, rachetée depuis longtemps par un groupe allemand, qui cède en 2002 à ce groupe ses services implantés à Rungis et les salariés de ces services. Un jugement concluant que l’article L1224-1 (reprise des salariés par l’entreprise acquéreuse) ne s’appliquait pas, la société normande propose aux salariés d’accepter un changement d’employeur, avec modification du contrat de travail. Soixante et un (sur 237) refusent, ils sont licenciés et contestent ce licenciement tant auprès de la société normande que du groupe allemand, en tant que coemployeur.

« Une Cour d’appel qui constate qu’une filiale est sous la totale dépendance d’un groupe qui absorbe 80 % de sa production et détermine les prix, que la société holding de ce groupe détient la quasi-totalité de son capital, qu’elle gère son personnel, dicte ses choix stratégiques et intervient constamment dans la gestion financière et sociale de la cessation d’activité de la filiale, en assurant la direction opérationnelle et la gestion administrative de celle-ci, peut en déduire qu’il existe entre la société-mère et sa filiale une confusion d’intérêts, d’activités et de direction caractérisant l’existence de coemployeurs... ». La Cour de cassation refuse donc les licenciements économiques, non justifiés par la situation de l’entreprise allemande, la qualifiant de « légèreté blâmable ».

Voilà qui est clair et bouleverse les relations internes aux groupes, d’autant plus que d’autres arrêts sont venus depuis confirmer cette lecture, dès le 1er février 2011, et que la même interprétation semble se développer dans d’autres domaines, fiscaux, commerciaux, environnementaux par exemple.

Ainsi, quand un établissement n’a pas d’autonomie de décision et de gestion, les contentieux risquent de plus en plus de remonter jusqu’à la maison-mère, et même si elle n’est pas française. C’est une donnée qui peut impacter fortement les groupes, les amener à modifier leurs fonctionnements, voire leurs statuts, et une évolution à connaître pour les élus des CCE et CE ainsi que les délégués et représentants syndicaux dans les groupes.