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Le regard de l’OCDE sur l’éducation française est sévère

mercredi 15 novembre 2017

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié son vingtième rapport annuel "Regards sur l’éducation", le 12 septembre. Il compare les systèmes éducatifs de ses 35 pays membres. L’OCDE y donne son avis sur l’organisation du système scolaire et universitaire français mais aussi sur les politiques en cours lancées par le gouvernement. Le regard est sévère...

que ce soit sur les rythmes scolaires comme sur les dépenses par élèves, les rémunérations des enseignants...

Un rapport annuel fort utile

Les indicateurs de l’OCDE est la publication de référence sur l’état de l’éducation dans le monde. Les sujets abordés sont : les résultats des établissements d’enseignement ; l’impact de l’apprentissage dans les différents pays ; les ressources financières et humaines investies dans l’éducation ; l’accès, la participation et la progression au sein des systèmes d’éducation ; l’environnement d’apprentissage ; et l’organisation scolaire.

Quel est l’état de l’éducation en France ?

  • La France est le pays comptant le moins de jours moyens d’école par an en primaire et le nombre le plus élevé d’heures de cours. Au cours de l’année scolaire 2016-2017, les élèves de primaire ont passé 162 jours à l’école, soit le nombre de jours « le plus bas de tous les pays de l’OCDE ». Ce calcul a été fait avant même le retour à la semaine de quatre jours en France, décidée par le gouvernement à la rentrée 2017. Dans les autres pays examinés, la norme est plutôt à la semaine de cinq jours à l’école. Par contre, paradoxe des paradoxes, le nombre d’heures de cours des élèves de l’enseignement primaire est en revanche plus élevé en France, par rapport à la moyenne des États membres de l’OCDE. Les élèves français ont en moyenne 864 heures de cours par an à l’école primaire, contre 800 pour l’ensemble de l’OCDE.
  • Les niveaux de dépense sont inégaux de l’école primaire à l’enseignement supérieur et la France cumule les déséquilibres internes et externes. Les dépenses annuelles des établissements scolaires pour un élève de primaire sont inférieures de 15 % à la moyenne des pays membres de l’organisation. Elles s’élèvent à environ 6 180 euros par élève et par an en France, contre 7 268 euros en moyenne. Les dépenses pour un élève en lycée sont, au contraire, supérieures de 37 % à la moyenne de l’OCDE. Elles atteignent 11 600 euros, alors que la moyenne des pays membres est de 8 437 euros. Au collège comme dans l’enseignement supérieur, les dépenses annuelles par élève sont très proches de la moyenne de l’OCDE. Satisfecit malgré tout, l’organisation note en parallèle que la part du produit intérieur brut (PIB) consacrée aux dépenses publiques d’éducation en France est légèrement supérieure à la moyenne des pays de l’OCDE (4,8 % du PIB).
  • Les salaires des enseignants du primaire doivent être revalorisés. L’OCDE dresse un constat sans appel car les salaires français dans le primaire sont inférieurs de 9 % à la moyenne de l’OCDE. Un débutant gagne même deux fois moins en France qu’en Allemagne. Et ce, malgré la politique de revalorisation entamée sous le mandat de François Hollande et alors même que le professeur des écoles français travaille 134 heures de plus que son homologue européen. Des spécificités qui ne se retrouvent pas du tout au collège ou au lycée où les salaires comme le temps de travail sont conformes à ceux pratiqués dans les autres pays occidentaux.
  • Les débouchés des filières professionnelles sont plus limités en France. Ainsi l’OCDE note que le taux d’emploi des jeunes ayant suivi une filière professionnelle y est inférieur à la moyenne, malgré les investissements pour les élèves de ces filières. 74 % des jeunes de 25 à 34 ans ayant suivi un cursus professionnel ont un emploi, contre 79 % en moyenne pour les pays européens. Ce taux d’emploi atteint même 85 % au Royaume-Uni et 86 % en Allemagne, rapporte l’OCDE.
  • Le risque de dépression recule avec le niveau de formation. En s’appuyant sur une vaste étude de santé menée en 2014, l’OCDE explique que les individus plus diplômés affichent « des taux moindres de morbidité et une plus longue espérance de vie », et que « les systèmes d’éducation peuvent aussi contribuer à réduire la dépression ». Ces résultats se confirment en France, où la part de dépressifs s’élève à 12 % parmi les personnes n’ayant pas le baccalauréat, contre 6 % pour les diplômés de l’enseignement supérieur. Soit, une différence du simple au double.

L’OCDE fait la leçon au gouvernement

L’occasion était belle de faire la leçon aux nouveaux ministres en charge de l’éducation, Jean-Michel Blanquer pour l’Éducation nationale, et Frédérique Vidal pour l’Enseignement supérieur. L’OCDE s’est montrée peu convaincue par certaines mesures prises par le gouvernement même si l’organisme a salué les efforts du gouvernement actuel et celui qui l’a précédé car « ils mettent l’accent sur le primaire ». Il a pointé un certain nombre de difficultés.

  • L’OCDE estime notamment que le dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP+ est une décision « très positive ». Mais relève que « l’on n’enseigne pas de la même façon à une classe de 12 élèves qu’à une classe de 25 ». L’organisation appelle ainsi le gouvernement à se pencher sur la formation pédagogique des enseignants.
  • Concernant le retour de la semaine de 4 jours, l’OCDE exprime de vives critiques. Un tiers des écoles primaires et maternelles ont choisi de revenir à ce rythme scolaire dès la rentrée. « Le choix des communes s’est basé sur des raisons financières, et on ne peut pas leur en vouloir, mais non sur le bien-être de l’enfant », a regretté Corinne Heckmann, la responsable de l’OCDE, lors de sa conférence de presse. « Avec moins de jours de classes, plus d’heures, on a en France des journées de classe très concentrées », a-t-elle poursuivi. « Comment adapter la pédagogie aux élèves les plus en difficulté lorsqu’on a un temps d’éducation aussi concentré ».
  • Sur la sélection à l’université, alors même que les propositions du gouvernement étaient en travaux, l’organisme a alerté les autorités françaises en se montrant très critique sur le tirage au sort et les très nombreux étudiants sur le carreau après le fiasco d’APB. Il souligne que le pic démographique de l’an 2000 n’était pas vraiment une surprise. Corinne Heckmann, dans sa conférence, a demandé au gouvernement de lancer la réflexion sur « les compétences » du bachelier et leur adéquation avec celles requises à l’université.

Il sera utile de regarder de près le bilan de l’OCDE qui paraitra en 2018 au regard de toutes ces interrogations.


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Déjà paru dans Clés du social