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La loi Plein emploi va s’appliquer

samedi 30 décembre 2023

Elle comprend la création de France Travail, un nouveau contrat d’engagement pour les demandeurs d’emploi ainsi que pour les allocataires du RSA, assorti de nouvelles obligations, pour les jeunes accompagnés et de nouvelles modalités pour l’emploi des personnes handicapées et la gouvernance de l’accueil des jeunes enfants. Elle a comme objectif, pour le gouvernement, de réduire le chômage autour de 5 % d’ici 2027. La loi a été votée le 14 novembre. Le Conseil constitutionnel saisi par les partis de gauche vient de se prononcer et a censuré ou fait des réserves sur certaines dispositions. L’application de la loi va donc suivre avec les décrets d’application.

Le chemin parlementaire de la loi

Le projet de loi avait été présenté au Conseil des ministres du 7 juin 2023. Son cheminement parlementaire, en particulier au Sénat, a durci la version initiale du gouvernement, s’attirant les critiques des associations et de certaines organisations syndicales.

La transformation de Pôle emploi en France Travail et un réseau commun à tous les acteurs

La loi prévoit d’abord la création au 1er janvier 2024 d’un nouvel opérateur dénommé « France Travail » en remplacement de Pôle Emploi. Ses missions sont renforcées avec un double objectif : un meilleur accompagnement de toutes les personnes qui ne sont pas en capacité de retrouver seules un emploi et le renforcement de l’accompagnement des entreprises dans leurs processus de recrutement.

La transformation de Pôle emploi en France Travail s’accompagne de la construction d’un « Réseau pour l’emploi » qui doit réunir l’opérateur France Travail, l’État, les collectivités locales, les missions locales et Cap emploi. D’autres acteurs pourront y participer. Mais, le Conseil constitutionnel a censuré l’article de la loi qui autorisait les acteurs constituant le Réseau pour l’emploi à partager entre eux certaines informations en particulier les données personnelles. Le ministère doit faire de nouvelles propositions.

Une inscription généralisée, un contrat d’engagement pour les personnes sans emploi avec des droits, des obligations et des sanctions

Une inscription généralisée auprès de l’opérateur France Travail sera mise en place, au plus tard en 2025, pour toutes les personnes sans emploi. Seront concernés :

  • les demandeurs d’emploi qui relèvent aujourd’hui de Pôle emploi ;
  • les demandeurs du revenu de solidarité active (RSA) (et leur conjoint, concubin ou partenaire pacsé) ;
  • les jeunes demandant un accompagnement auprès des missions locales ;
  • les personnes handicapées sollicitant un accompagnement auprès de Cap emploi.

L’inscription sera automatique pour les demandeurs du RSA dès le dépôt de leur demande d’allocation ainsi que pour les jeunes ou personnes handicapées demandant à être accompagnés.

Tous ces demandeurs bénéficieront d’une orientation et d’un diagnostic global et devront signer un contrat d’engagement, qui viendra remplacer les dispositifs actuels. Ce contrat d’engagement comportera « un plan d’action précisant les objectifs d’insertion sociale et professionnelle » et une obligation d’au moins 15 heures d’activité par semaine qui pourront aussi être des actions de formation pour les demandeurs d’emploi nécessitant un accompagnement ou les allocataires du RSA.

Cette durée de 15 heures a été fortement critiquée par les associations regroupées au sein du réseau Alerte et les syndicats CFDT, CGT, UNSA comme une stigmatisation. Elle pourra être abaissée ou exclue en fonction de la situation du signataire. Par une réserve d’interprétation, le Conseil constitutionnel a jugé que « cette durée devra être adaptée à la situation personnelle et familiale de l’intéressé et limitée au temps nécessaire à l’accompagnement requis, sans pouvoir excéder la durée légale du travail en cas d’activité salariée ». En cas de non-respect du contrat d’engagement, l’opérateur France Travail pourra radier la personne de la liste des demandeurs d’emploi.

Pour les bénéficiaires du RSA, un nouveau régime de sanctions est instauré qui viendra remplacer le système existant. Les allocataires risqueront, en cas de refus de signer leur contrat d’engagement ou de non-respect des engagements, des sanctions graduées. Un décret doit préciser le dispositif, notamment la part maximale de RSA pouvant être suspendue ou supprimée.

Sur les sanctions des demandeurs d’emploi et des allocataires du RSA, le Conseil constitutionnel a précisé que le pouvoir réglementaire, « en fixant ces durées et la part du revenu ou des allocations pouvant être suspendue ou supprimée », devra « veiller au respect du principe de proportionnalité des peines ».

Des mesures pour l’accès à l’emploi des travailleurs handicapés

Les orientations en établissements et services d’accompagnement par le travail (ESAT) seront prononcées par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) sur une préconisation de France Travail, en privilégiant l’orientation en milieu ordinaire simple ou accompagné. Les personnes non bénéficiaires de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), mais titulaires d’une pension d’invalidité ou d’une rente d’incapacité, auront les mêmes droits que les titulaires d’une RQTH, sans passer par la MDPH. Une équivalence de RQTH sera accordée aux jeunes de 15 à 20 ans en situation de handicap.
Les entreprises adaptées de travail temporaire (EATT) et les contrats à durée déterminée nommés « Tremplin » (CDDT), jusqu’ici expérimentaux, sont pérennisés.

Les droits des travailleurs en ESAT sont alignés sur ceux des salariés ordinaires (avec conservation de leur protection spécifique).

Des dispositions pour l’accueil des jeunes enfants et les crèches

Un dernier volet est consacré à la gouvernance en matière d’accueil du jeune enfant, avec l’idée de supprimer les freins à la reprise d’emploi des parents de jeunes enfants. Les communes se voient confier le rôle d’autorité organisatrice de l’accueil du jeune enfant, rôle que nombre d’entre elles exercent déjà dans les faits. Les communes de plus de 10 000 habitants devront établir un schéma pluriannuel de maintien et de développement de l’offre d’accueil du jeune enfant à partir de 2025. Les mêmes communes devront mettre en place des relais petite enfance à partir de 2026. Enfin, un nouvel article a été introduit pour mieux contrôler les crèches.

En conclusion, si le projet de loi n’a pas toujours fait la Une des journaux, la loi votée introduit de nombreux changements pour les personnes concernées en particulier en termes d’obligations. Il sera nécessaire de mener à bien toutes les évaluations utiles pour démontrer l’intérêt de ces mesures et in fine l’insertion dans l’emploi. Quant au volet institutionnel et en particulier la création du « Réseau pour l’emploi » sa visibilité est pour l’instant très opaque. Affaire à suivre.


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