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Les moins significatifs des ordonnances…

samedi 18 novembre 2017

Censées favoriser le dialogue social dans les entreprises, quand on y regarde de près, les nouvelles dispositions du code du travail sur les instances représentatives du personnel amoindrissent les droits des représentants du personnel par petites touches dans un certain nombre de domaines. Pas de bouleversements, pas de quoi mettre des centaines de milliers de manifestants dans la rue mais des moins qui démontrent de la part du législateur une approche défensive du droit des représentants du personnel. Nous avons fait ici un tour non exhaustif de ces petits moins.

Notion d’établissement distinct

La notion d’établissement distinct peut être définie par accord d’entreprise ou accord de la majorité des membres du Conseil social et économique (CSE) ou à défaut par l’employeur. Le critère retenu est dorénavant l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement notamment en matière de gestion du personnel. Auparavant, c’était la communauté des travailleurs et des intérêts qu’ils ont en commun qui était le critère retenu. Une dimension plus large, ce qui pourrait se traduire par la suppression de nombreuses représentations du personnel dans les petits établissements.

Référence de temps pour la création ou la suppression du CSE

Il faut maintenant 12 mois consécutifs à l’effectif requis pour créer le CSE et non plus 12 mois consécutifs ou non sur une période de 36 mois comme c’était le cas pour la création des DP ou CE. On réduit donc les possibilités de création. À l’inverse, quand il s’agit de supprimer le CSE, il suffit d’être en dessous de 11 salariés pendant 12 mois au lieu de 24 mois consécutifs ou non auparavant pour les DP.

Attributions pour les CSE de moins de 50 salariés

Là encore, globalement, le CSE conserve les attributions des délégués du personnel, il perd tout de même la possibilité de faire appel au droit d’alerte et il n’est plus consulté sur l’utilisation des contrats aidés et n’a plus d’attribution en matière de formation professionnelle, compétences qu’il n’exerçait pratiquement pas. Par ailleurs, il n’est plus prévu qu’il puisse accompagner l’Inspecteur du travail lors de ses visites.

Experts

Plusieurs dispositions visent à réduire les possibilités de recours aux experts ou limitent leur action. Il en va ainsi de la définition par accord du nombre d’expertises a priori par an ou sur plusieurs années et des imprécisions sur la fourniture de documents aux experts par l’employeur. Globalement les possibilités de véto sur le choix de l’expert par l’employeur sont renforcées, par exemple, quand le CSE ne peut pas financer sa part de financement.

Sur le financement, le co-financement est la règle pour toutes les expertises (20 % pour le CSE et 80 % pour l’entreprise). Celles concernant la situation économique et financière, la politique sociale ou en cas de licenciement ou de risques grave sur la santé, la sécurité et les conditions de travail continuent d’être financées intégralement par l’employeur. Mais cette nécessité de financer à 20 % les expertises par le CSE rend difficile la possibilité du financement de recours aux experts pour les petits CSE ou ceux qui bénéficient de prestations en nature pour le 0,2 % de fonctionnement.

Frais de fonctionnement

Il sera maintenant possible de faire basculer l’excédent annuel des 0,2 % du budget de fonctionnement vers celui des activités sociales et culturelles. Une manière d’inciter les CSE à moins recourir aux experts ou financer moins de formation syndicale ou réduire les achats de documents pour financer les ASC de l’entreprise, ce qui est souvent plus populaire vis-à-vis des salariés et surtout permet de diminuer d’autant la dotation de l’entreprise au CSE.

Nombre d’élus et heures de délégation

Même si le décret sur les moyens des élus est plutôt rassurant dans ce domaine avec le maintien du nombre global et la mutualisation des heures de délégation, il n’en reste pas moins que fort logiquement la concentration des instances en une seule se traduit par une diminution du nombre d’élus. Cela va se traduire par une perte de substance et de possibilité d’action sur le terrain pour les sections syndicales ou les syndicats d’entreprise qui avaient la possibilité de remplir tous les postes acquis par des élus différents. Ce sont le plus souvent les organisations les plus dynamiques et efficaces. Et enfin, il faudra veiller à la mixité, femmes/hommes, toujours menacée lorsqu’on baisse le nombre de représentants.

En conclusion

Soulignons tout d’abord les quelques mieux notamment avec les dispositions sur le maintien des compétences professionnelles des élus d’entreprises et la prise en compte de celles développées durant leur mandat, qui sont des améliorations qu’il ne faut pas négliger. Ces dispositions reprennent les propositions du rapport Simonpoli.

Rappelons enfin que, dans de nombreux cas, la négociation d’entreprise peut améliorer le contenu de ces dispositions.

Mais au final, le droit syndical est plutôt revu à la baisse. En cela, il répond aux attentes d’une partie du patronat et des organisations patronales qui considèrent le dialogue social comme une charge ou au minimum une contrainte qu’il faudrait alléger au maximum et quand il remet en cause le pouvoir de décision de l’employeur sur les orientations de l’entreprise. C’est le cas notamment des dispositions concernant l’expertise.

Ces ordonnances auraient pu préfigurer une vision moderne des relations du travail dans les entreprises se basant sur un dialogue social constructif avec des acteurs disposant des moyens suffisants pour répondre à cette exigence. Au regard d’une lecture attentive de ces nouvelles dispositions, ce n’est malheureusement pas le cas. Dommage !


Sources