1. Accueil
  2. > Dialogue social
  3. > Pouvoirs Publics
  4. > Conseil national de la refondation (CNR) : on en sait (...)

Conseil national de la refondation (CNR) : on en sait un peu plus !

mercredi 12 octobre 2022

Un peu moins d’un mois après la réunion d’introduction du Conseil national de la refondation (8 septembre 2022), l’exécutif vient de lancer le site www.conseil-refondation.fr. Ce site qui se veut participatif éclaire un peu plus la démarche voulue par le chef de l’État et les différents thèmes qui seront débattus par les acteurs du Conseil de la refondation. Ils pourront donner lieu à contribution de la part de tous ceux qui le souhaitent. Cette nouvelle méthode de concertation réussira-t-elle ?

Retour sur les origines du CNR et sa première réunion

Dans sa présentation sous forme d’une vidéo, Emmanuel Macron rappelle la filiation du CNR avec les démarches qu’il avait engagées lors du premier quinquennat à la suite du mouvement des gilets jaunes. Il y a eu d’abord le Grand débat qui avait suscité un grand engouement sans forcément se traduire par des décisions très visibles même si le chef de l’État en rappelle quelques-unes dans sa présentation.

Parmi elles, Il cite la Convention citoyenne sur le climat qui a débouché sur la loi Climat en 2021 et qui procédait selon lui de la même volonté de permettre l’expression citoyenne pour construire la loi. On se souvient de l’espoir suscité par la convention citoyenne mais aussi de la déception de certains d’acteurs sur sa traduction dans la loi.

Le CNR a été présenté par le Président de la République entre les élections présidentielle et législative. Le sigle sous forme de clin d’œil au Conseil national de la Résistance cherche à susciter la mobilisation de l’ensemble de la nation. Il explique qu’il s’agit d’engager une « nouvelle méthode de dialogue et d’action » qui « vise à aller plus loin en intégrant davantage les citoyens et les grands acteurs de notre société sur les grandes transitions de notre pays à venir ».

La première réunion, qui a eu lieu le 8 septembre, a été abordée par les différents acteurs avec beaucoup de circonspection. Pour certains invités, il n’était pas question de participer. C’est le cas de tous les partis politiques d’opposition et sur le plan syndical de la CGT, de FO, de la CFE-CGC, de la FSU et de Solidaires. La CFDT, la CFTC et l’UNSA sont venues mais en affichant beaucoup de scepticisme compte-tenu des difficultés qu’elles avaient rencontrées pour se faire écouter de l’État durant le premier quinquennat.

Nous l’avons dit dans l’article « Quelle place pour les partenaires sociaux dans le contexte politique de la rentrée 2022 ? » paru en septembre [1], les participants semblaient relativement satisfaits de la teneur et de la forme des débats lors de cette première réunion. Mais le débat à l’intérieur du gouvernement et de ses soutiens au Parlement sur la nécessité d’aller vite par un amendement au PLFSS ou rentrer dans une nouvelle séquence de discussions sur le dossier des retraites n’a pas rassuré les acteurs partisans du dialogue. Et même si le parti d’une concertation a été pris, ce débat risque de peser sur la confiance, seule condition pour que le CNR devienne un véritable lieu d’échange et de construction. D’ailleurs, le lancement du site www.conseil-refondation.fr juste après la décision de lancer la concertation sur les retraites n’est peut-être pas complétement le fruit du hasard.

La méthode

  • Bâtir ensemble des stratégies nationales…

L’objectif est de bâtir des stratégies nationales mais aussi locales sur les transitions en cours dans notre société à partir de diagnostics sinon partagés, au moins débattus, notamment pour pointer les points d’accord ou de désaccord. Il s’agit, selon le chef de l’État, de répondre aux défis de « la transition productive et celle du modèle social », « de la transition climatique, c’est-à-dire la réponse au réchauffement climatique et à la biodiversité » mais aussi de « la transition démographique, c’est-à-dire le vieillissement de la population et les réponses qu’il importe ». Il y aura aussi des débats sur « la transition numérique, avec les changements de comportement, d’organisation de notre production, les inégalités qu’ils suscitent » et « la transition du travail, qui est un peu le fruit de tout cela ».

La démarche est structurée à trois niveaux. Un premier niveau appelé le « CNR plénier » consiste à réunir les acteurs de la vie nationale dans le format de la première réunion tous les trois à six mois sous l’égide du président de la République ou de la Première ministre. Ils pourront s’exprimer sur les grands défis nationaux et suivre l’avancée des travaux des CNR thématiques et territoriaux ou proposer d’autres sujets à débattre.

  • …thématiques et locales

Les CNR thématiques réuniront les partenaires « pertinents » sur les thèmes abordés. Quant aux CNR territoriaux ils permettront d’aborder des sujets de la vie quotidienne tels que l’école, la santé, les freins à l’emploi ou encore la transition écologique dans les territoires. Il s’agira de proposer des réponses concrètes, des innovations ou réaliser des expérimentations.

Deux projets locaux sont d’ores et déjà lancés : l’école et la santé sur lesquels des solutions locales et nationales doivent être trouvées.

Cette démarche se construira progressivement en fonction des thématiques ou des projets avec la volonté d’associer les citoyens. Une participation largement encouragée par le site sous le terme « Je participe » où après avoir cliqué dessus on vous demande vos coordonnées et si vous voulez contribuer aux réflexions nationales ou si vous souhaitez participer localement.

Une limite toutefois, il ne s’agit pas, selon les déclarations de l’exécutif, de se substituer aux institutions de la république.

Les questions

Après ce premier lancement sur internet de nombreuses questions demeurent. Les contours et la démarche de cette nouvelle méthode demandent encore de nombreuses précisions. Cherche-t-on une mobilisation spontanée basée sur la volonté des acteurs d’adhérer au processus engagé ou faudra-t-il faire preuve de beaucoup de détermination pour la rendre efficace et pour qu’elle débouche sur des résultats mesurables et surtout visibles pour la population ? Quel rôle l’exécutif veut-il réellement lui donner ? Comment cela sera-t-il intégré dans les processus de décision ?

Cette nouvelle consultation citoyenne suscitera-t-elle le même engouement rencontré lors du Grand débat ? Quel sera le niveau d’engagement des acteurs alors que la société française semble divisée et de nombreux acteurs pour le moins très circonspects ?

Mais aussi quel sera aussi le niveau d’engagement de l’exécutif dans la durée ? La démarche telle qu’elle lancée n’est-elle pas en elle-même encore marquée par une vision très verticale du pouvoir, privilégiant la relation directe entre le sommet du pouvoir et les citoyens ? Sur quoi tout cela peut-il déboucher ?

Une nouvelle déception des acteurs qui se seront eux-mêmes engagés dans la démarche entraînerait des conséquences dramatiques sur la capacité de notre société à dépasser les clivages pour répondre aux enjeux auxquels nous sommes confrontés.


Référence