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Les clés du social : Les principes fondateurs de la Sécurité sociale

Les principes fondateurs de la Sécurité sociale

Publié le 11 octobre 2025 / Temps de lecture estimé : 5 mn

Les 4 et 19 octobre 1945, en France, deux ordonnances instituent la Sécurité sociale, c’est l’aboutissement d’un long processus. : des sociétés de charité puis des sociétés de secours mutuel (caisses d’ouvriers, catholiques, patronales…). Puis des caisses d’assurance sociale dans les années 1930 soumises à des conditions d’affiliation, de cotisations complexes avec des prestations sociales faibles et l’arrivée en 1945 de la Sécu soit la création d’un réseau coordonné de caisses et des administrateurs élus par leurs salariés. Deux grandes lois sociales sont votées en 1898 sur les accidents du travail et en 1910 sur les retraites ouvrières et paysannes.

  • En 1920 une loi sur les assurances sociales « pose les bases d’un système obligatoire d’assurance, qui couvre les salariés les plus pauvres ».
  • Avant 1945, la protection sociale était réservée aux salaires en dessous d’un certain plafond. Les salariés les plus aisés étaient renvoyés à l’assurance libre. Des mutuelles existaient pour les fonctionnaires.
  • L’objectif fixé dans l’exposé des motifs des ordonnances de 1945 était « de couvrir l’ensemble de la population contre l’ensemble des facteurs d’insécurité ».

Dans des sociétés construites sur la base de corporatismes de métiers, en Europe deux systèmes voient le jour :

  • Le modèle Bismarckien, mis en place en Allemagne à la fin du XIXème siècle, renvoie à des modes de prise en charge qui privilégient la logique assurantielle : les cotisations déterminent les prestations. Il vise le maintien du niveau de vie des travailleurs et repose sur les partenaires sociaux. Les régimes d’assurance chômage d’inspiration bismarckienne sont administrés par les partenaires sociaux.
  • Le modèle Beveridgien privilégié par les Anglais en 1942 s’inscrit dans une logique assistancielle : les prestations sont financées par l’ensemble de la population et versées aux personnes qui en ont besoin. Le budget de l’État assure les soins de santé et verse à tous la même allocation vieillesse universelle. Il vise à protéger l’ensemble de la population de la pauvreté. Les régimes d’assurance chômage beveridgiens sont gérés directement par l’État.

En France, l’organisation de notre modèle social depuis 1945 repose sur 3 types de transferts :

  • Des assurances sociales collectives d’abord financées par des cotisations assises sur le travail.
  • Des prestations d’assistance ensuite, généralement sous conditions de ressources, financées par l’impôt et par des taxes.
  • Des services publics universels (l’éducation et la santé), qui sont subventionnés mais parfois payants.

L’organisation du système de protection sociale se réfère à quatre principes définis à la Libération avec pour principe fondateur « chacun contribue à la sécurité sociale selon ses moyens et bénéficie de ses prestations selon ses besoins ».

  • L’universalité : toute la population résidente est couverte par la protection sociale (de base et complémentaire, avec une spécificité : le copaiement des mêmes prestations par la branche maladie de la Sécurité sociale et les organismes complémentaires d’assurance maladie).
  • L’unité  : en 1945, tous les risques sociaux devaient être gérés au sein d’un même régime ; mais il en est allé différemment par la suite.
  • L’uniformité : les prestations de protection sociale sont assurées en fonction des besoins de chacun.
  • La gestion par les représentants des assurés sociaux : les intérêts des assurés sociaux sont gérés par des représentants désignés.

La Sécurité sociale est dans sa gouvernance, son financement, dans les modalités de sa mise en œuvre, le résultat de débats et d’une histoire complexe. Il s’agit d’une agrégation de dispositifs qui emploient environ 150 000 personnes. Elle est divisée en trois ensembles :

  • Le régime général, qui concerne les salariés du secteur privé et les indépendants (88 % de la population française). Il est divisé en 5 branches :
    • La branche famille verse les aides financières comme les allocations familiales et de logement ou le revenu de solidarité active (RSA).
    • La branche maladie rembourse les frais de santé et compense la perte de revenu des travailleurs en cas d’arrêt maladie.
    • La branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) prend en charge les frais qui naissent des aléas de la vie professionnelle.
    • La branche retraite verse les pensions des retraités de l’industrie, des services et du commerce.
    • La branche autonomie gère les dépenses liées à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.

Chaque branche est gérée par un organisme spécialisé responsable de son propre équilibre financier. En plus de ces branches, le fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’occupe de différents traitements pour les plus âgés, dont le minimum vieillesse.

  • Le régime agricole qui accompagne les exploitants et les salariés de l’agriculture (5 %).
  • Les 27 régimes spéciaux (dont ceux des fonctionnaires et des employés de la SNCF) qui couvrent 7 % de la population.

Les recettes de la Sécu proviennent principalement :

  • Des cotisations sociales des personnes qui travaillent et des employeurs (45 % du budget de la sécu).
  • De la contribution sociale généralisée (CSG).
  • Des « impôts et taxes affectées » qui sont des prélèvements fléchés vers le financement de la Sécurité sociale.
  • D’une part importante de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Au fil du temps, plusieurs changements ont modifié le financement de la Sécurité sociale, de sa gestion, tout en gardant le principe de la solidarité nationale :

  • Supprimées par les ordonnances Jeanneney, puis remises en 1983 par François Mitterrand, les élections à la Sécurité sociale tombèrent en désuétude, avant d’être à nouveau supprimées en 1996.
  • L’instauration de la CSG, en 1991, impôt qui repose sur les revenus du travail mais aussi sur ceux du patrimoine crée avec certaines forces politiques (voir le parti communiste) une opposition et de nombreux débats, au motif que cette taxe accroît le rôle de l’État dans la gestion de la sécurité sociale au détriment des partenaires sociaux.
  • En 1995, le plan Juppé et ses ordonnances pour réduire le déficit de la Sécu accroit le pouvoir des acteurs administratifs et politiques dans les caisses au détriment des partenaires sociaux.
  • En 2024, pour la branche maladie, la réforme de 2004 a modifié la composition du conseil ainsi que le rôle des partenaires sociaux qui ne sont plus consultés que sur les orientations et le budget.

Trois branches de la Sécu sont légèrement bénéficiaires, deux branches sont très déficitaires, celle de la maladie et celle de la vieillesse. Un débat s’installe dans le pays sur le déficit de la Sécu. Comment faire face à l’augmentation des dépenses maladie due en grande partie au vieillissement de la population. Quelles solutions pour contrer la montée des idées d’étatisation, de privatisation et de remise en cause de l’autonomie de gestion de la Sécu ?


Références