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Les clés du social : Quels sont les critères de l'inégalité des chances ?

Quels sont les critères de l’inégalité des chances ?

Publié le 6 avril 2024 / Temps de lecture estimé : 3 mn

Pour comprendre l’idée, largement partagée par les Français, que l’inégalité des chances est très marquée dans notre pays, une étude de France Stratégie analyse le pouvoir du sexe, de l’environnement familial (profession des parents, ascendance migratoire) et territoriale (région et type de territoire), sur le revenu d’activité perçu pendant la première partie de la vie active.

L’étude est réalisée à l’aune exclusive du revenu d’activité des individus (salaire et revenu non salarié), l’étude concerne tous les individus d’une classe d’âge qu’ils soient salariés du secteur privé ou public, indépendants, chômeurs ou inactifs.
Étude à partir d’un échantillon permanent de 100 000 individus observés en tant qu’enfant en 1999 jusqu’en tant qu’adulte en 2018.

L’origine sociale de l’étude est construite à partir de la position sociale des deux parents :

  • Sont considérées comme issus de milieux favorisés les personnes dont au moins l’un des parents est cadre ou profession intermédiaire et l’autre également ou « petit indépendant », soit 22,5 % des personnes de l’échantillon.
  • Sont considérés comme issues d’origine modeste les individus dont seul un parent est actif, ouvrier ou employé (25 % de l’échantillon).

L’origine sociale s’avère la plus déterminante en termes de revenu d’activité : en moyenne, 1 100 euros net par mois séparent le quart des personnes d’origine favorisée du quart des personnes d’origine modeste, à origine migratoire et territoriale comparables.

  • Les écarts de revenus entre origines sociales sont d’abord liés à des parcours éducatifs différents, notamment au diplôme obtenu (plus que la spécialité choisie ou que l’accès à une grande école).
  • Entre 2010 et 2018, il y a eu peu d’évolution de l’inégalité des chances, pour tous les critères retenus, sauf celle entre hommes et femmes. L’écart de revenus d’activité selon l’origine sociale est resté quasiment stable entre 2010 et 2018.
  • Parmi ces individus, l’écart de revenus entre personnes d’origine sociale favorisée et modeste est similaire aux deux dates : 1 000 euros en 2010 et 1 050 euros en 2018 par mois.
  • Les évolutions des écarts de revenu selon le contexte familial ou territorial sont de faible ampleur, compte tenu du nombre restreint de personnes concernées par l’enquête, individus âgés de 35 à 38 ans, proches de l’échantillon principal (37 ans).

L’origine sociale et le sexe sont beaucoup plus déterminants sur le revenu que l’ascendance migratoire et le lieu de résidence à l’adolescence : en comparant ces individus de même âge à 9 ans d’intervalle, on constate que l’écart de revenus entre les hommes et les femmes a baissé de 28 % (de 750 euros à 550 euros environ).

  • En comparant ces individus de même âge à neuf ans d’intervalle, on constate que la baisse est statistiquement significative au-dessus du seuil de 5 %. Elle reflète la convergence des taux d’activité et de chômage au cours du temps et l’augmentation du niveau de diplôme des femmes.
  • Les personnes qui cumulent les différentes caractéristiques défavorables, soit les femmes d’origine modeste, descendantes d’immigrés d’Afrique et ayant grandi en ZUS (zone urbaine sensible) dans une région pauvre, perçoivent un revenu moyen de 1 000 euros par mois. 60 % de l’écart de cette catégorie s’explique par l’origine sociale et le sexe.

Les hommes d’origine favorisée gagnent le double des femmes d’origine modeste (3 300 euros contre 1 500 euros) avec une hétérogénéité au sein de chaque catégorie.

  • À titre d’exemple, 11 % des femmes d’origine modeste gagnent davantage que la moitié des hommes d’origine sociale favorisée et, parmi les hommes d’origine sociale favorisée, on constate un rapport de 1 à 7,4 (soit une différence de 5 000 euros mensuels) entre le seuil des 10 % les plus rémunérés et celui des 10 % les moins bien rémunérés.
  • Ce rapport est 2 fois plus grand chez les femmes issues d’une famille modeste, du fait de l’importante proportion d’entre elles avec de très faibles revenus d’activité (8 % n’ont aucun revenu).
  • Les deux catégories à plus faibles revenus à l’âge adulte sont les femmes d’origine intermédiaire et modeste.
  • Si la naissance des enfants n’accentue pas significativement les écarts de revenus d’activité entre origines sociales, elle explique près de 60 % des écarts de revenus entre hommes et femmes.

Entre origines sociales, les écarts de revenus sont liés principalement au parcours éducatif (70 %) : à parcours éducatif comparable, les différences de temps de travail et de poste occupé comptent environ pour 15 % :

  • 68 % des écarts de revenus d’activité restent inexpliqués par l’enquête.
  • Cela signifie que les écarts transitent par d’autres effets, inobservables dans les données, ou des comportements différenciés entre des employeurs et des salariés (maternité pour les femmes).

Cette étude éclaire les politiques publiques de lutte contre l’inégalité des chances sur deux points principaux. Parmi les 4 caractéristiques « héritées » par les individus, l’origine sociale est de loin celle qui a le plus d’effet sur les écarts de revenus à l’âge adulte. Le sexe arrive en deuxième position en dépit de la baisse tendancielle des écarts de revenus entre hommes et femmes. Pour autant, s’il y a inégalités des chances, il n’y a pas déterminisme.


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