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Vieilles recettes pour dépenses « mesures jeunes » …

mercredi 26 août 2020

La crise sanitaire a engendré de nombreux problèmes pour l’économie et conduit à une crise de l’emploi dans de nombreux secteurs. Importantes suppressions d’emploi, report de certaines embauches rendent le marché du travail difficilement accessible pour les jeunes ayant terminé leur formation en juin 2020 (environ 750 000) ou ayant besoin d’un employeur pour se former, via l’alternance, dans les mois et années à venir.

Dans l’objectif de faciliter l’emploi des jeunes, le gouvernement a pris, en différentes étapes, toute une série de mesures d’aides aux entreprises pouvant les embaucher.

Les premières mesures, décidées début juin, ont concerné l’apprentissage

Au-delà des mesures concernant directement les apprentis (l’aide versée par les OPCO pour le premier équipement pouvant désormais servir à l’achat d’un ordinateur ou d’une tablette, prolongation de la durée, de 3 à 6 mois, pour trouver un contrat), les mesures concernent essentiellement les entreprises privées. Pour toute embauche, du 1er juillet 2020 au 28 février 2021, d’un apprenti en formation (en vue d’obtenir une certification professionnelle allant des niveaux équivalents au CAP jusqu’à la licence professionnelle incluse) l’entreprise aura droit au versement d’une prime de 5 000 euros, si l’apprenti est mineur, et de 8 000 euros pour un adulte. Et ce sans condition pour les entreprises de moins de 250 salariés. Pour les entreprises de plus de 250 salariés, il leur faudra avoir atteint 5 % d’alternants dans leurs effectifs (à l’échéance du 28 février 2021) pour en garder le bénéfice. Objectif premier du gouvernement : maintenir en 2020–2021 les effectifs d’apprentis à leur niveau de 2019 (environ 370 000 formés dans cette voie).

Mais aussi, objectif de maintenir l’appareil de formation, impacté par la loi du 5 septembre 2018 (loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel) ayant instauré, à compter du 1er janvier 2020, un nouveau mode de financement des CFA, en fonction du nombre d’apprentis accueillis dans chaque centre. Cette logique du « marché » et du « coût contrat », censée dynamiser le secteur, devient un réel problème lorsque les offres d’alternance se raréfient fortement, et alors même que les CFA ont dû par ailleurs souvent procéder eux-mêmes à des embauches (référents handicap ou qualité, personnels du service comptabilité…) pour répondre aux obligations nouvelles fixées par la loi de 2018. Le gouvernement s’est donc également engagé à ce que des mesures d’adaptation puissent être prises pour les CFA en difficulté.

L’annonce de la limitation de l’aide aux jeunes ne dépassant pas le niveau bac + 3 a immédiatement suscité de vives réactions de la part des responsables d’universités (CPU), des écoles d’ingénieurs (Cdefi), du réseau des grandes écoles (CGE), ou de branches professionnelles (SYNTEC – conseil, ingénierie, numérique - notamment). Tous ont dénoncé une « rupture d’égalité entre les étudiants », laissant de côté les hauts niveaux de qualification. Si ce choix du gouvernement pouvait se comprendre, les niveaux de qualification les moins élevés étant ceux qui ont le plus de mal à accéder à un emploi, l’exclusion de la mesure pour les jeunes en contrat de professionnalisation interrogeait cependant fortement.

Volte-face en juillet : le gouvernement décide finalement d’étendre la mesure à tous les niveaux de l’apprentissage et aux contrats de professionnalisation.

Après consultation des partenaires sociaux, des associations de jeunes et d’élus locaux, le Premier ministre, Jean Castex, annonce que « l’État accompagnera chaque jeune qui en a besoin » et présente pour cela, le 23 juillet, toute une série de nouvelles mesures, déclinées dans le cadre du plan « un jeune, une solution ».

Première mesure phare de ce plan, l’aide à l’embauche des moins de 26 ans

L’entreprise qui, en CDD ou en CDI d’une durée d’au moins 3 mois, recrute, entre le 1er août 2020 et le 31 janvier 2021, un jeune de moins de 26 ans et rémunéré jusqu’à deux fois le smic bénéficie d’une aide pouvant atteindre 4 000 euros sur un an. Cette aide est versée par tranche trimestrielle, au prorata du temps de travail du jeune et de la durée de son contrat.

Les autres principales mesures marquent le retour en grâce auprès du gouvernement des « contrats aidés ». Après en avoir diminué le nombre de manière drastique, le gouvernement redécouvre l’intérêt de ces contrats pour les publics les plus éloignés de l’emploi.

Ce revirement se traduit notamment par :

  • 60 000 « contrats initiative emploi » (CIE), dont une partie du salaire est financée par l’État, pour les jeunes rencontrant des difficultés particulières d’insertion.
  • Pour 2021, +60 000 « parcours emplois compétences » par rapport à 2019 (94 000). Ces contrats aidés peuvent être signés dans le secteur associatif ou le secteur public.

À cela s’ajoute :

  • Une augmentation de 100 000 places en service civique ;
  • 200 000 places supplémentaires en formation qualifiante ou pré-qualifiante dans les « métiers d’avenir » : transition écologique, santé, numérique, secteurs prioritaires du plan de relance… Avec un financement par le PIC (plan d’investissement dans les compétences) pour certaines d’entre elles ;
  • 300 000 « parcours d’insertion » pour les jeunes les plus éloignés de l’emploi ;
  • En 2021, augmentation de 100 000 à 150 000 du nombre d’entrées en « garantie jeunes », dispositif d’insertion géré par les missions locales, pour les jeunes sans emploi ni formation. Ce dispositif permet à ces jeunes de disposer d’un accompagnement renforcé pendant un an, ainsi que d’une allocation de 497 euros par mois.

Toutes ces dispositions, nécessaires pour ne pas sacrifier une partie importante de la jeunesse, posent néanmoins la question des « effets d’aubaine » et de la pérennisation à long terme des emplois par les entreprises bénéficiaires.

Elles laissent également en suspens, à un moment où les entreprises seront plus focalisées sur la production que sur la formation de courte durée d’élèves non « productifs », la question de l’accueil des jeunes (environ 650 000 pour les seuls élèves de lycée professionnel) en stages en entreprise, stages pourtant indispensables à la validation des diplômes professionnels.


Références