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Compromis parlementaire sur l’assurance chômage dans l’attente d’une loi

mercredi 23 novembre 2022

Le 16 novembre 2022, à la suite du bras de fer entre parlementaires tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, ainsi qu’à l’opposition des organisations syndicales, sénateurs et députés ont trouvé un compromis en commission mixte paritaire (CMP) sur le projet de réforme de l’assurance chômage.

Après l’adoption définitive du projet de loi portant sur des mesures relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, un décret prolonge temporairement les règles d’indemnisation du chômage et les dispositions relatives au bonus-malus jusqu’en 31 janvier 2023. Les dispositions d’application, fixées par décrets, de la nouvelle convention d’assurance chômage devront être réalisées avant le 31 décembre 2023 et, pour celles relatives au bonus-malus, avant le 31 août 2024, afin de laisser le temps à la réforme de 2019 de produire tous ses effets.

Comment fonctionne le chômage jusqu’au 31 janvier 2023 ? Certains volets de la réforme de 2019 ont été suspendus en raison de la crise sanitaire du Covid et ils ont été reportés à plusieurs reprises. La deuxième partie de la réforme est entrée en vigueur par étapes :

  • Le 1er octobre 2021 pour ce qui concerne les règles de calcul du salaire de référence, de la durée d’indemnisation et de son différé.
  • Le 1er décembre 2021 pour ce qui concerne la modification de la durée minimale d’affiliation requise pour ouvrir des droits à indemnisation, la dégressivité de l’indemnisation à compter du 7ème mois pour les hauts revenus.
  • Le 1er septembre 2022, la réforme est définitivement arrivée à son terme, avec l’entrée en application du bonus-malus sur les contrats courts.

Permettre au gouvernement d’engager des concertations avec les partenaires sociaux afin de préparer une nouvelle réforme de l’assurance chômage, avant le 31 décembre 2023. Certains axes de la nouvelle réforme figurent dans le texte de loi « plein emploi ». 5 principaux changements pourraient intervenir début 2023 au fur et à mesure des décrets :

1- Faire évoluer les règles d’indemnisation en fonction de la situation du marché du travail (assouplir les règles d’indemnisation quand l’économie va bien et mieux protéger les chômeurs quand les choses vont mal). Le Medef est favorable à une modulation des règles d’indemnisation en fonction de l’état du marché du travail, ce qui n’est pas le cas des syndicats de salariés, tous opposés au principe de modulation. Ils pensent que les difficultés de recrutement que rencontrent les employeurs sont davantage liés à la formation des demandeurs d’emploi et à l’attractivité des métiers. L’entrée en vigueur de ces nouvelles règles de modulation sont prévues pour le 1er février 2023 par décret :

  • Après concertation avec les partenaires sociaux pour échanger sur les paramètres contrat de sécurisation professionnelle, fonction du taux de chômage au sens du BIT (bureau international de l’emploi) et ratio entre le nombre d’offres d’emploi disponibles et celui des chômeurs inscrits à Pôle emploi, la modulation de la durée d’indemnisation prévoit une durée d’indemnisation minimale de 6 mois.et une durée d’indemnisation réduite de 25 %.Cela ne s’appliquera pas aux intermittents, aux dockers, aux pêcheurs embarqués, aux personnes licenciées pour motif économique bénéficiant d’un contrat de sécurisation professionnelle ni aux demandeurs d’emploi en outre-mer.
  • Cependant lorsque les demandeurs d’emploi arriveront en fin de droits, si l’état du marché du travail est au-dessus de 9 % ou le chômage en progression de +0,8 point sur un trimestre, la durée d’indemnisation reviendra au niveau actuel.

2- Refondre l’organisation avec la création de France travail (création d’un organisme unique). Actuellement les demandeurs d’emploi sont accompagnés par différents interlocuteurs : l’État via Pôle emploi, les partenaires sociaux pour la gestion de l’Unedic, les régions pour leur formation, les départements pour l’insertion des bénéficiaires du RSA. De futures concertations vont avoir lieu sur la gouvernance de l’Unedic.

3- Refuser l’octroi d’allocations chômage aux salariés qui font un abandon de poste : il serait assimilé à une démission. Cet amendement, désormais inscrit dans le texte de loi, prévoit l’instauration d’une « présomption simple de démission du salarié qui quitte volontairement son poste ». Le salarié qui fait un abandon de poste et ne reprend pas le travail malgré la mise en demeure de son employeur par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l’employeur, sera prochainement considéré comme démissionnaire avec les conséquences que cela implique en matière d’indemnisation du chômage. Le délai qui sera fixé par l’employeur pour laisser le temps au salarié de reprendre son travail ne pourra pas être inférieur à un délai déterminé ultérieurement par décret. Un garde-fou est prévu pour prévoir des recours si l’abandon vient de raisons jugées légitimes (santé, sécurité du salarié menacée).

4- Bloquer le versement des allocations chômage lorsqu’un salarié en CDD s’est vu proposer un CDI à l’échéance de son contrat à durée déterminée, et qu’il a refusé un CDI à deux reprises au cours des 12 mois précédents. Le projet de loi « plein emploi » prévoit pour l’employeur qui propose un CDI après un CDD pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente, de la même classification et sans changement du lieu de travail, de notifier cette proposition au salarié mais également à Pôle emploi. Après deux refus de CDI dans les 12 derniers mois, un demandeur d’emploi ne pourra pas prétendre au versement d’allocation chômage. Cela entrainera la perte des indemnités de précarité mais aussi la perte de l’indemnisation chômage.

5- Bloquer le versement des allocations chômage lorsqu’un intérimaire s’est vu proposer deux fois un CDI par l’entreprise utilisatrice à l’issue d’une mission, et qu’il refuse par deux fois cette proposition. Cela entraine la perte des indemnités de fin de mission et la perte de l’indemnité chômage.

En 2018, la loi avenir professionnel a institué une lettre de cadrage que le gouvernement envoie aux partenaires sociaux. Le texte de la CMP 2022 réintroduit le paritarisme dans la gestion de l’assurance chômage en remettant les partenaires autour de la table. « Les discussions entre partenaires sociaux peuvent ouvrir la possibilité de remettre en cause la lettre de cadrage » suivie le cas échéant d’une négociation. Ce principe doit être discuté lors des concertations à venir. Le document d’orientation envoyé aux partenaires sociaux portera sur l’équilibre financier du régime et sur l’opportunité de maintenir une lettre de cadrage. Le projet de loi a été voté le 15 novembre 2022 à l’Assemblée nationale et le 17 au Sénat. La concertation du 21 novembre n’a apporté aucune évolution. Les syndicats ont acté leur complet désaccord avec ces nouvelles règles d’indemnisation. Et le Conseil constitutionnel a été saisi par des députés.


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