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Articuler l’analyse du chômage à celle des territoires pour être plus performants

mercredi 26 août 2020

Voilà ce que vient de réaliser France Stratégie en s’intéressant aux années 2006 et 2018 avec comme objectif de faire émerger des modèles de performance et de lutte contre le chômage. Les conclusions de l’enquête permettraient de renouveler l’action publique de soutien aux territoires alors même que se profile le défi territorial posé par la sortie de crise liée à la pandémie du Covid-19 et ses inévitables conséquences en matière de marché du travail.

Des cartes de France parlantes

Que nous apprennent les cartes de France des taux de chômage en 2006 et en 2018 (voir cartes jointes) ? D’abord, les disparités entre zones d’emploi apparaissent très marquées avec des rapports de 1 à 4 entre les zones d’emploi affichant les taux de chômage les plus faibles et celles où ils sont les plus élevés. Ainsi le taux de chômage va de 4,5 % aux Herbiers en Vendée à 16,5 % à Agde-Pézenas en 2018. Ensuite, ces disparités évoluent peu au fil du temps : sur la période étudiée, 80 % des zones d’emploi ont connu une évolution de leur taux de chômage comprise dans un intervalle d’un point autour de la moyenne nationale. Et les bonnes performances sont malheureusement beaucoup plus rares que les mauvaises en 2018 quant à leur évolution sur douze ans.

Quels sont les territoires les plus performants à l’égard de la baisse du chômage ?

L’étude s’est intéressée aux vingt territoires ayant un taux de chômage inférieur au taux de chômage national. En 2018, on voit apparaître plusieurs clusters : certains sont bien identifiés comme les Marches de Bretagne à l’ouest et les périphéries de Strasbourg et Paris mais également un groupe de territoires ruraux dans le Sud de la France.

Si l’on regarde de plus près les vingt territoires ayant connu l’évolution la plus favorable entre 2006 et 2018, on obtient deux groupes distincts. Le premier, déjà caractérisé par de faibles taux de chômage en 2006 et qui connait une situation semblable en 2018, se répartit sur la moitié nord du pays. Le second groupe est disséminé le long d’un arc bordant les frontières du quart nord-est de notre pays et, bonne nouvelle, alors que ces territoires étaient dotés de taux de chômage initialement élevés, ils ont largement amélioré leurs situations.

La carte du chômage est différente de celle des créations d’emploi et de l’attractivité résidentielle

C’est vrai en 2018 et c’était déjà le cas en 2006. Pour prendre un exemple concret, le littoral languedocien connaît une augmentation continue de sa population (et de sa population active) et voit sa courbe de création d’emploi suivre cette dynamique mais affiche des taux de chômage parmi les plus élevés de France, en 2018 comme en 2006. À l’inverse, une partie de l’ancienne Auvergne, considérée du point de vue de la croissance comme particulièrement fragile, présente des taux de chômage très bas, de façon constante.

Une approche du chômage multifactorielle

Cette approche permet de sortir d’une logique d’analyse purement économique car le chômage est aussi le catalyseur d’autres phénomènes sociaux, d’où son importance primordiale pour l’opinion publique mais aussi pour les autorités locales. En outre, l’analyse des taux de chômage sur dix ans révèle aussi des trajectoires positives y compris au sein de territoires marqués par des taux de chômage en niveau très élevés comme l’étaient la Lorraine et les Hauts de France.

Comment identifier les sources potentielles de performance et d’amélioration ?

Premier enseignement de l’enquête, contrairement à ce qu’auraient pu laisser penser les disparités très marquées en matière de taux de chômage entre des catégories de population, la source de performance ne semble pas résider dans les structures de population.
Il n’y a pas un modèle de performance. La présence d’une ressource ou encore la mise en place d’un modèle productif ne garantissent en aucun cas la performance de façon automatique. Certes, certaines caractéristiques semblent avoir un impact relativement positif, comme la proximité avec certaines métropoles ou frontières, des infrastructures, un modèle industriel assez robuste et diversifié ou encore la concentration en secteurs innovants au sein d’une structure de type métropolitain.
Mais ce sont donc bien les caractéristiques locales des territoires et des systèmes productifs, la mobilisation de tous les acteurs qui semblent contribuer principalement à leurs performances diverses en matière de chômage. Il faut arriver à construire un modèle productif qui corresponde au mieux aux ressources à disposition des territoires et qui s’insère dans son environnement et dans les relations qu’il tisse avec lui, en termes de mobilités quotidiennes mais également de capacité à échanger et coopérer.

En conclusion, les chercheurs montrent qu’il faut résister au schéma unique, souvent fondé sur l’attractivité résidentielle de populations spécifiques comme les jeunes, les cadres ou les professions intermédiaires… Au contraire, ils illustrent la multiplicité des trajectoires possibles de lutte contre le chômage et la place importante qu’y prennent les territoires.


Source

  • Cartes "Taux de chômage par zone d’emploi"
    (cliquez sur la vignette pour agrandir l’image)