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Quel coût de la vie en ville et à la campagne ?

mercredi 26 avril 2023

Deux enquêtes de France Stratégie proposent une analyse sur le pouvoir d’achat des Français. En fonction de l’endroit où ils vivent, les ménages français font-ils leurs achats à des prix différents ? Comment se situe « le reste à dépenser » le plus faible, une fois que le ménage a fait face à ses dépenses de transport-logement-alimentation ? Au centre des agglomérations, où à l’inverse ? Dans les communes les plus éloignées des zones d’emploi ? Si les dépenses moyennes sont différentes, c’est parce que les ménages qui vivent dans ces territoires sont différents en termes de revenu ; seule la région parisienne échappe à cette règle. Les deux enquêtes que publie France Stratégie sont fondées sur la même source principale (la dernière enquête Budget de famille de l’INSEE de 2017).

L’enquête Budget de famille réalisée tous les 5 ans par l’INSEE depuis une quarantaine d’années donne une vue détaillée des dépenses des ménages pour différents biens et services. Elle fournit un certain nombre de renseignements sur les caractéristiques des ménages telles que leur composition, leurs revenus ou encore leur situation géographique. L’enquête de 2017 est réalisée sur la base d’un échantillon d’environ 28 500 ménages en France métropolitaine :

  • Sur la base de cette enquête, les dépenses annuelles des ménages en logement et en transport s’élèvent à près de 10 250 euros par unité de consommation
  • Pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans, elles représenteraient en moyenne 21 500 euros par an.
  • Elles constituent à elles seules un peu moins de la moitié des dépenses des ménages.
  • Ces 2 postes affichent la plus grande variabilité entre les territoires, des méthodes statistiques permettent de séparer les dépenses des ménages en logement et en transport entre territoires, entre ce qui a trait au territoire à proprement parler et ce qui a trait à d’autres déterminants comme les différences sociodémographiques.

Les différents cas types de l’enquête : on s’appuie sur 4 pseudos cas-types de ménages aux caractéristiques contrastées :

  • 1- Homme seul, âgé de 30 à 50 ans, locataire dans le parc privé, actif de profession intermédiaire et de niveau médian.
  • 2- Un couple avec 2 enfants accédant à la propriété, de niveau médian et dont la personne de référence est âgée de 30 à 50 ans, active, de profession intermédiaire.
  • 3- Un couple de retraités, sans enfants à charge, âgés de plus de 65 ans, propriétaires non-accédants, de niveau médian.
  • 4- Une mère célibataire, âgée de 30 à 50 ans, avec deux enfants de moins de 14 ans, employée, locataire dans le parc social et appartenant au 1er décile de niveau de vie.

Sans prendre en compte la définition des cas-types de l’enquête, la dépense cumulée de transport et de logement est 15 % plus élevée en périphérie des grandes aires urbaines que dans les pôles des aires urbaines moyennes. Les ménages parisiens dépensent en moyenne presque 30 % de plus, du fait du prix du logement très au-dessus de leur niveau observé dans le reste de la France. Après la prise en compte des cas-types de l’enquête, les écarts entre catégories de territoires sont fortement réduits. Au final, le reste à dépenser des ménages, à niveau de vie, composition familiale, statut d’occupation au logement et âge donnés, est assez peu sensible à la localisation, exception faite pour l’agglomération parisienne.

  • Seuls les ménages vivant en Île-de-France affichent des montants de dépenses agrégées significativement différents (plus élevés) de ceux du territoire de référence.
  • Paris intra-muros se détache particulièrement des autres territoires avec un niveau de dépenses supérieur de près de 15 % à celui du territoire de référence, pour un ménage aux caractéristiques identiques (l’écart est donc réduit de moitié après contrôle de la composition sociodémographique).

Pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans, cet écart passe de 500 euros à 250 euros par mois en moyenne entre Paris et la moyenne du territoire de référence lorsqu’on compare deux ménages aux caractéristiques sociales identiques. L’indicateur de pouvoir d’achat dépend du « reste à dépenser » qui prend en compte à la fois les ressources des ménages, leurs besoins et le niveau des prix auxquels ils font face, en tenant compte des 3 postes : alimentation, transport et logement qui absorbent en moyenne plus de la moitié des ressources des ménages français et nettement plus pour les ménages pauvres :

  • Où est-il financièrement le plus intéressant d’habiter pour un ménage de caractéristiques socioéconomiques données ? À revenu et à configuration familiale donnés, le lieu de vie influence peu le reste à dépenser.
  • La région parisienne fait exception à cette règle, en raison d’un coût du logement très élevé mais c’est en région parisienne que les restes à dépenser sont les plus élevés, en raison de revenus nettement supérieurs.
  • Les ménages les plus pauvres en niveau de vie comme en termes de reste à dépenser se situent souvent au centre des agglomérations ou, à l’inverse, dans les communes qui sont les plus éloignées des zones d’emploi.
  • Le niveau de dépenses ne dit pas tout. Dans les zones chères, les ménages du parc privé consentent à des sacrifices et ils habitent des logements plus petits.

Reste à dépenser mensuel moyen par unité de consommation, en fonction de la distance au centre de la zone d’emploi (source : enquête Budget de famille 2017) : après avoir fait leurs dépenses logement-alimentation-transport, les ménages disposent en moyenne par mois et par unité de consommation :

  • Communes-centres : de 882 euros ;
  • Distance inférieure à 10 km : 992 euros ;
  • Distance de 20 à 30 km : 956 euros ;
  • Distance supérieure à 30 km : 847 euros.

Où vivent les ménages en difficulté financière ? Une fois qu’ils ont fait face à leurs dépenses de logement, d’alimentation et de transport, les ménages disposent d’un reste à dépenser qui dépend moins de leur localisation que de leurs ressources ou des besoins liés à leur situation sur le marché du logement (locataires, propriétaires, accédants à la propriété).

  • Les différents territoires accueillent des ménages différents, tant en termes de ressources que de configuration familiale ou de position dans le cycle de vie (actifs ou retraités).
  • L’analyse purement pécuniaire de reste à dépenser est insuffisante pour juger des conditions de vie, comme pour le logement (voir les sacrifices des ménages locataires parisiens en termes de dépenses et de m2 occupés).
  • D’autres avantages non étudiés dans cette analyse peuvent rehausser la qualité de vie des ménages des centres des métropoles (accès aux services publics et privés).
  • L’éloignement géographique, choisi ou subi, peut se doubler d’un éloignement social, politique ou culturel qui pèse sans doute plus lourd dans l’émergence du mouvement de contestation que les questions purement financières.

La France a toujours soutenu la redistribution territoriale. L’analyse proposée est statique, elle ne dit rien des parcours résidentiels des ménages, elle n’informe pas non plus sur l’évolution des ménages qui vivent dans ces territoires. Par rapport à 2017, la hausse des prix de l’énergie a depuis peu un impact plus fort sur les ménages qui doivent prendre leur voiture pour se déplacer ou pour chauffer un logement demandant une forte composante énergétique.

Ces enquêtes ne tiennent pas compte du « reste à vivre » défendu par le Conseil national des politiques de lutte contre l’exclusion qui définit le reste pour vivre entre les ressources du ménage et un certain nombre de contraintes : télécommunications, santé, éducation, loisirs…

En 2022, l’inflation s’établit à 5,2 % selon l’INSEE. La population plus riche dans les métropoles, plus active, plus jeune, locataire de petites surfaces et circulant en transport en commun est mieux protégée face à l’inflation des coûts énergétiques et alimentaires qui plombent le pouvoir d’achat de tous les ménages.


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