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UE : mais où sont passés les 750 milliards du plan de relance !

mercredi 1er juillet 2020

La Commission européenne a présenté un plan de relance de 750 milliards salué par tous les acteurs dont la Confédération européenne des syndicats. Mais si la Commission propose, le Conseil dispose. Il faut donc une décision des chefs d’États et de Gouvernements pour que ce plan soit adopté. Un conseil, virtuel, a eu lieu le 19 juin pour discuter ce plan de relance. Comme prévu aucune décision n’a pas pu être prise par le blocage des pays dits « fourmis » face aux pays dits « cigales ». Mais les fourmis savent aussi chanter …la situation n’est donc pas désespérée.

Un plan ambitieux

Suivant l’initiative franco-allemande, le plan présenté par la Commission est urgent à mettre en œuvre et on voit bien là les difficultés de décision de l’Union européenne à 27 car les décisions doivent être prises à l’unanimité (heureusement le Royaume-Uni ne participe plus à la discussion !). L’objectif, appuyé sur trois piliers, est : de soutenir fortement les États membres en matière d’investissements dans le cadre d’un développement durable ; de relancer l’économie en s’appuyant sur les secteurs stratégiques comme la santé, l’espace et la défense, l’intelligence artificielle ; de tirer les leçons de la crise en développant (enfin) une Europe de la santé. Il faut souligner l’approche nouvelle sur une politique industrielle européenne, sujet difficile à aborder jusqu’à maintenant compte tenu des résistances allemandes. Ce n’est pas là la moindre des évolutions d’Angela Merkel et de l’Allemagne pour sortir l’UE d’une crise profonde. La crise économique due à la pandémie a montré la fragilité ou plutôt la vulnérabilité des pays de l’UE en matière d’approvisionnement de produits et matériels médicaux…

On peut espérer que le retard d’un mois, avec le nouveau Conseil mi-juillet, ne sera pas trop préjudiciable. Comme l’a souligné la Confédération Européenne des Syndicats (CES), 42 millions d’emplois sont liés à la décision du Conseil (il s’agit du nombre de travailleurs placés en chômage temporaire durant la crise sanitaire selon une étude de l’Institut syndical européen-ETUI).

Au moins on ne peut pas parler d’une fracture Nord/Sud à partir du moment où la France et l’Allemagne jouent un rôle moteur et que l’aide bénéficiera particulièrement à l’Italie, à l’Espagne et à la Pologne.

Des aides sous conditions

Voilà où le bât blesse. Le financement de la relance devrait, selon la plupart des pays, aider particulièrement les pays les plus touchés, avec une partie non remboursable, alors que pour l’Autriche, les Pays-Bas, la Suède et le Danemark toute aide devrait être sujette à remboursement et liée à des réformes d’économie budgétaire dans les pays bénéficiaires. Pourtant, comme l’a si bien dit Jacques Delors, ce plan doit être un plan de relance, pas un plan d’économie budgétaire ! La Commission, appuyée par la France et l’Allemagne, continue de défendre une approche solidaire du Plan.

Comment rembourser cette dette collective ? Si on ne veut pas augmenter les contributions nationales ni réduire les dépenses européennes alors les « ressources propres » de l’Union européenne reviennent en premier plan. La création de ces ressources propres par des taxes communes (par ex. droits d’émission de CO2 plus élevés, taxe numérique, impôts sur les grandes entreprises…) permettrait à la Commission de ne plus dépendre presque entièrement des contributions des États membres et lui donnerait la capacité de rembourser l’emprunt collectif (ce remboursement ne commencerait qu’en 2028…).

Le soutien des partenaires sociaux

Dès l’initiative franco-allemande de mai sur un premier plan de relance de 500 milliards, les syndicats français (CGT-CFDT-FO-CFTC-UNSA) et allemand (DGB) avaient publié une tribune commune pour saluer cette initiative insistant sur la nécessaire solidarité d’un plan devant s’appuyer sur une mutualisation de la dette. Les organisations françaises dynamisaient ainsi la politique demandée par la CES au niveau européen.

Mais dans différents secteurs économiques les partenaires sociaux européens se sont également exprimés en commun sur la relance européenne. IndustriAll (fédération syndicale européenne des industries de la métallurgie, de la chimie et du textile) a adopté une déclaration commune avec le CEEMET, la fédération patronale européenne des industries métallurgiques, techniques et technologiques, demandant une réponse coordonnée pour faire face aux conséquences de la crise et une relance basée sur la durabilité, la sécurité des travailleurs, de bons emplois et qu’aucun travailleur ne soit laissé pour compte. Les partenaires sociaux européens de l’industrie de la construction ont lancé, le 19 juin, un appel conjoint à la Commission européenne pour une reprise rapide et durable et exprimé leur soutien au plan d’investissement européen [1] .

Rendez-vous en juillet

Le prochain Conseil devrait avoir lieu les 17/18 juillet prochain et devrait donc décider du plan de relance après encore quelques résistances des pays opposés à l’aide non remboursable et quelques aménagements du Plan. Il faut noter un élément important de ce Conseil, c’est que l’Allemagne présidera le prochain semestre de l’Union européenne à partir du 1er juillet. Cela donnera un rôle important sinon essentiel à Angela Merkel qui avait déclaré à l’issue du Conseil du 19 juin : « personne n’a remis en cause le principe d’un endettement commun, la structure globale du plan de relance proposée par la Commission européenne est donc maintenue ».

Pour la première fois depuis longtemps l’Union européenne, sous l’impulsion de la Commission, a l’opportunité de donner une véritable perspective à l’avenir de l’Union et de donner tout son sens à la solidarité, fondement de la création de la Communauté européenne.


Notes :

[1La Fédération européenne des travailleurs du bâtiment et du bois (EFBWW) et la Fédération européenne de l’industrie de la construction (FIEC), ainsi que cinq autres organisations de l’UE - Confédération européenne des constructeurs (EBC), Construction Products Europe, Housing Europe, International Union des propriétaires fonciers (UIPI) et l’Alliance européenne des entreprises pour l’efficacité énergétique des bâtiments (EuroACE)