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Quel habitat pour les 85 ans en 2030 ?

mercredi 22 mars 2023

Un rapport du Haut-Commissariat au plan et du cercle de réflexion Matières Grises nous alerte sur les mesures nécessaires pour l’hébergement d’un habitat adapté aux personnes âgées à l’horizon 2030-2040 des baby-boomers de 85 ans et plus qui seront plus de 5 millions (2 millions aujourd’hui). La DREES indique que le nombre de personnes âgées dépendantes évoluera de 2,2 millions à 2,9 millions.

Constats : les « 75-84 ans » constituent une population autonome mais qui se caractérise par des fragilités physiques, psychiques ou sociales. Les « 85 ans et plus » sont plus souvent confrontés à des situations de perte d’autonomie. De 2020 à 2030, les « 75-84 ans » vont voir leur nombre exploser (+47 %). Puis à partir de 2030, les « 85 ans et plus » vont voir leur nombre croître de façon exponentielle jusqu’en 2050. Ces nouveaux séniors qui avaient 20 ans en 1968 auront le choix entre 3 stratégies : rester chez soi, se trouver un « nouveau chez soi » ou vivre en EHPAD.

À chacune de ces évolutions correspondent des politiques publiques différentes

  • La politique d’adaptation (prévention, adaptation des logements, des villes, des mobilités, lutte contre l’isolement social, repérage des fragilités…) est de la responsabilité des communes.
  • La politique de la prise en charge de la perte d’autonomie est pilotée par l’État, les départements et les acteurs des secteurs sanitaire et médico-social.

« Vieillir chez soi » : c’est le vœu d’une grande majorité, mais cela nécessite un logement adapté. La France est en retard en matière d’adaptation des logements au vieillissement. Près de 10 000 personnes âgées meurent, chaque année, de chutes domestiques. Et vieillir chez soi nécessitera souvent de changer de « chez soi », pour retarder ou supprimer l’entrée en EHPAD. Cela nécessite une politique volontariste d’adaptation des logements. En attendant certains retraités en prennent conscience et anticipent leur vieillissement, voir :

  • L’explosion des Résidences Services Séniors dont 75 % des résidents sont des femmes, valides, veuves âgées de 80 ans et plus.
  • Le développement actuel de formules alternatives au domicile classique comme les habitats inclusifs, les résidences intergénérationnelles, les béguinages…
  • Les déménagements de plus en plus fréquents de séniors de leur pavillon situé en péri-urbain vers des lieux de centralité dotés de commerces, de transports et de services publics.

Comment rénover les EHPAD ? Tout doit être repensé, de la philosophie qui sous-tend la façon dont sont reçues les personnes âgées à l’architecture des lieux, de la qualité des services proposés au respect des droits et de l’intimité de la personne en passant par l’implication maximale des familles et des proches :

  • Sortir les personnes autonomes de l’EHPAD.
  • Développer les nouvelles formes de domicile pour les personnes valides mais fragiles.
  • Repenser le rôle des EHPAD pour qu’ils soient adaptés demain aux besoins et aux envies de la nouvelle génération des baby-boomers.
  • Le lien entre domicile et établissements doit s’estomper progressivement au profit d’EHPAD jouant le rôle de plateforme de services et de soins sur un territoire donné. Le décret N° 2022-731 du 27 avril 2022 crée des centres de ressources territoriaux.
  • Un besoin de places ne devrait pas se faire sentir d’ici 2030. On évalue à 60 000 le nombre de places qu’il serait nécessaire de créer d’ici 2050.

Dans le domaine de l’habitat alternatif, les besoins sont estimés entre 200 000 et 300 000 places d’ici 2050 :

  • Les opérateurs de Résidences Services Séniors prévoient à eux seuls la création de plus de 100 000 logements.
  • Le plan de promotion de l’habitat inclusif lancé par le gouvernement table sur la création de plusieurs dizaines de milliers de places.
  • La création de nouvelles résidences autonomie demeure dynamique dans notre pays.
  • Les résidences autonomie (ex. Logements-foyers) au nombre de 2 200, hébergent plus de 100 000 de concitoyens. Elles sont pour 70 % d’entre elles gérées par des centres communaux d’action sociale. Elles souffrent d’un immobilier ancien et dégradé, elles nécessitent un effort de réhabilitation en lien avec les collectivités locales et les bailleurs sociaux car elles sont indispensables à la cohésion sociale de nos territoires.

Nécessaire diversité des territoires : on ne vieillira pas de la même façon en cœur de métropole, en péri-urbain ou en milieu rural. La transition démographique n’emporte pas les mêmes enjeux et conséquences que l‘on soit dans un département situé dans cette « diagonale du vide », qui cumule vieillissement et perte de population ou dans une métropole jeune et dynamique. Les politiques du vieillissement doivent prendre en compte ces spécificités territoriales : la Creuse n’est pas la Seine-Saint-Denis, le besoin en offre d’hébergement ne se comprend pas de la même façon dans un quartier prioritaire de la ville qu’à la campagne.

Chaque territoire doit avoir un plan d’action face au vieillissement : le département doit pouvoir y concourir, en liaison avec les différents acteurs du territoire (Agence régionale de santé-ARS, Centres communaux d’action sociale-CCAS, intercommunalités, opérateurs de transport, acteurs du logement, associations, gestionnaires sanitaires et médico-sociaux…), sous la forme d’un Schéma départemental de la transition démographique en place et lieu des Schémas Autonomie trop restrictifs :

  • Faire du département l’ensemblier des actions d’adaptation de la société au vieillissement et lui confier la réalisation tous les 3 ans d’un schéma départemental de la transition démographique.
  • Y inclure l’attractivité des métiers du grand âge. C’est dans le bassin d’emploi que la concurrence des offres sur le marché du travail détermine en partie la disponibilités des personnels du secteur.
  • C’est au niveau du département que pourront être activés certains leviers pour lutter contre la crise des vocations dans le secteur médico-social. Sachant que certains départs à la retraite ne seront pas remplacés : on prévoit un déséquilibre de 224 000 emplois d’aides à domicile et 104 000 emplois d’aides-soignants dans les années 2030.

Au-delà d’une loi grand âge toujours attendue du gouvernement, le sujet du vieillissement sur les territoires doit intégrer les 3 dimensions d’une population âgée dont les envies, les désirs, les motivations vont évoluer ; d’une offre qui doit être beaucoup plus souple et adaptée aux situations de chacun ; et d’une planification élaborée au plus près de la vie quotidienne de nos concitoyens.


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