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Le maintien en emploi des séniors (rapport Bellon)

mercredi 12 février 2020

La concertation spécifique de janvier 2020 sur les pénibilités - gestion des fins de carrière - emploi des séniors - minimum de retraite - prise en compte des droits du passé s’est appuyée sur le diagnostic du rapport Bellon-Mériaux-Soussan (voir Clés du social http://www.clesdusocial.fr/concertation-sur-les-fins-de-carriere). Ce rapport établit un diagnostic précis de l’emploi des travailleurs expérimentés en France. Il formule 38 propositions regroupées autour de cinq axes pour faire face aux enjeux du vieillissement au travail.

En moyenne en 2018, 56 % des personnes âgées de 55 à 64 ans étaient actives au sens du Bureau international du travail (BIT) en France (hors Mayotte), 52,1 % étaient en emploi et 3,8 % étaient au chômage, soit un taux de chômage par rapport aux actifs de 6,9 %.

L’allongement de l’âge de la retraite, les politiques d’emploi des entreprises habituées à se débarrasser des « vieux actifs », ont considérablement augmenté le nombre de personnes ni en emploi, ni à la retraite, ni en préretraite comme le montrent les constats de la DRESS, dans son étude de fin 2016.

Caractéristiques des séniors fin 2016 avec les personnes ni en emploi, ni à la retraite, ni en pré-retraite entre 53 ans et 69 ans :

  • Ce sont en majorité des femmes (66 % contre 52 % pour l’ensemble des séniors).
  • Des personnes moins diplômées et souvent en mauvaise santé (22 % se déclarent en mauvaise santé contre 7 % des séniors en emploi et 10 % de ceux en retraite).
  • Ils sont plus éloignés du marché du travail que les personnes de 25 à 52 ans sans emploi.
  • 13 % seulement sont des chômeurs au sens du BIT (recherche active d’un emploi).
  • Leur niveau de vie médian s’élève à 1 270 euros par mois en 2015. Il est inférieur à celui des séniors en emploi (2 090 mensuels) ou des retraités (1 860 mensuels).
  • Près du tiers des séniors sans emploi ni retraite vivent en dessous du seuil de pauvreté monétaire, contre 6 % des séniors retraités et 7,4 % des séniors sans emploi.
  • 24 % n’ont aucun revenu personnel ou minimum social mais ils vivent en couple avec un conjoint ayant des revenus.

Résoudre le problème de l’emploi des séniors. En France, malgré un fort redressement dans la période récente, le taux d’emploi des séniors reste inférieur à la moyenne européenne. Il accuse un retard important par rapport au nord de l’Europe (de 19 à 25 points). En fin de carrière, une proportion sensible de salariés passe par des périodes de chômage ou d’inactivité entre leur sortie définitive du marché du travail et leur départ à la retraite (c’est-à-dire la liquidation de leurs droits).

Cinq axes de travail sont préconisés pour faire face aux enjeux du vieillissement au travail :

  • Placer la prévention de l’usure professionnelle et les enjeux du vieillissement au centre de la future réforme de la santé au travail.
  • Renforcer l’investissement en formation à partir de la mi-carrière.
  • Faciliter les mobilités et les évolutions professionnelles.
  • Assouplir les frontières entre emploi et retraites.
  • Faire évoluer profondément nos représentations liées à l’âge.

Une quarantaine de pistes sont proposés autour des 5 axes de travail dont parmi elles :

  • Faciliter l’accès à des formations longues de reconversion pour les salariés ayant ouvert des droits au titre de la pénibilité.
  • L’instauration d’un bilan de compétence et d’un entretien professionnel individuel pour les salariés à mi-carrière.
  • Le déplafonnement du compte personnel de formation (CPF), à partir de 45 ans, dans le cadre de la formation continue.
  • Un accès à la retraite progressive (activité à temps partiel et versement d’une partie de la retraite pour les plus de 60 ans) étendu aux cadres « forfaits jours », aux professions libérales et aux agents publics.
  • La génération de nouveaux droits pour les retraités à taux plein reprenant une activité professionnelle.
  • La possibilité d’un « aménagement raisonnable » de l’organisation du travail pour les salariés approchant la fin de carrière.

Il faut responsabiliser les entreprises pour « valoriser l’expérience » et :

  • Mettre l’enjeu du vieillissement au cœur des politiques de prévention et de santé au travail.
  • Prévenir les risques d’obsolescence des compétences en seconde partie de carrière.
  • Mais aussi favoriser les transmissions de savoir des séniors.
  • Faciliter les mobilités et transitions professionnelles favorables au maintien en emploi.

Le rapport recommande « une action publique plus constante et plus volontariste, dans le cadre d’une stratégie intégrée du vieillissement actif au travail », à travers de :

  • La tenue d’assises,
  • La mise en place d’observatoires gouvernementaux,
  • La création d’une délégation interministérielle,
  • La nécessité de réintroduire la problématique de l’emploi des séniors dans le cadre des négociations professionnelles avec les partenaires sociaux.

C’est un problème de société urgent mais qui ne pourra pas se résoudre sur un temps court. Il faut opérer une révolution culturelle, préconisent les rapporteurs Bellon – Mériaux - Soussan :

« Aucune solution unique ne pourra avoir raison d’une question aujourd’hui fonction de trajectoires sociales et individuelles extrêmement diverses (dynamique des recompositions familiales, problématiques des aidants, montée des maladies chroniques, carrières des femmes, etc.), qui rendent peu pertinents les raisonnements uniquement fondés sur les catégories socioprofessionnelles, les tranches d’âges ou les revenus.
Améliorer durablement la situation de l’emploi des travailleurs expérimentés ne pourra pas non plus se faire uniquement dans le cadre du débat sur les modalités de la réforme des retraites, sujet lié mais non assimilable à l’enjeu de l’emploi des travailleurs expérimentés.
Cet enjeu requiert une intention et un cadre politiques forts permettant d’aborder de manière globale le sujet du vieillissement, au-delà de la question du travail ou du maintien en emploi des travailleurs expérimentés. Il s’agit surtout et avant tout d’engager l’ensemble de notre société dans un processus de remise en question profonde des pratiques ancrées de longue date et d’adhésion de chacun à de nouvelles représentations enviables pour l’avenir. »


Références