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Les discriminations sur le marché du travail pour les personnes d’origine étrangère

mercredi 24 mai 2023

L’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) publie en mars 2023 une étude sur les immigrés et descendants d’immigrés en France. Si, sur le plan scolaire, les enfants d’immigrés rattrapent leur retard au niveau des diplômes à la 3ème génération, qu’en est-il des discriminations sur le marché du travail ? L’étude cible plusieurs immigrations dont celle des personnes d’origine maghrébine : leur situation sur le marché du travail est dégradée, candidatures moins suivies, taux de chômage plus élevé…

Les personnes d’origine maghrébine sont les personnes immigrées ou descendantes d’immigrés du Maghreb, ou celles dont les candidatures suggèrent cette origine. Elles sont comparées aux personnes sans ascendance migratoire (ni immigrées ni descendantes d’immigrés, ou dont les origines suggèrent une origine française). Les discriminations sont abordées selon 3 dimensions :

  • Le comportement des recruteurs vis-à-vis des candidats avec un taux de rappel plus bas. Leurs candidatures à un poste sont moins suivies d’un entretien d’embauche (-10 points).
  • Le risque de chômage de groupes d’actifs sur le marché du travail est plus élevé (+10 points).
  • Un sentiment de discrimination plus fréquent (deux fois plus) de ces actifs immigrés sur leur situation.

En 2021, 70 % des immigrés de 15 à 64 ans sont actifs, c’est-à-dire en emploi ou au chômage, contre 74 % des personnes sans ascendance migratoire directe et 67 % des descendants d’immigrés :

  • Quelle que soit l’ascendance migratoire, le taux d’activité est le plus élevé entre 25 et 49 ans. L’écart de taux d’activité entre les immigrés et les personnes non immigrées, ni descendantes d’immigrés est le plus important entre 25 et 49 ans, tandis qu’entre 50 et 64 ans les taux d’activité sont proches quelle que soit l’ascendance migratoire.
  • Le taux d’activité des descendants d’immigrés est plus faible que celui des immigrés. Cette différence s’explique par leurs différences de structure par âge, les premiers étant plus jeunes et les 15-24 ans ayant un taux d’activité plus faible.
  • Si leur distribution par classes d’âge (15-24, 25-49 et 50-64 ans) était similaire à celle des personnes sans ascendance migratoire directe, le taux d’activité des immigrés serait de 66 % et celui des descendants d’immigrés de 70 %.

Les femmes ont un taux d’activité plus faible que celui des hommes, quelles que soient l’ascendance migratoire et la tranche d’âge. Entre 15 et 64 ans, le taux d’activité des femmes est de 70 % contre 76 % pour les hommes :

  • L’écart femmes-hommes est le plus important parmi les immigrés : entre 25 et 49 ans notamment, le taux d’activité des immigrées est inférieur de 24 points à celui des immigrés, alors que l’écart est de 11 points au sein des descendants d’immigrés et de 5 points au sein de la population sans ascendance migratoire directe.

Le taux d’activité des hommes dépend peu de leur descendance migratoire ou de leur situation familiale alors que, pour les femmes, il varie fortement en fonction du nombre et de l’âge des enfants. Le taux d’activité des femmes entre 25 et 49 ans ayant 3 enfants ou plus est de 67 % contre 86 % lorsqu’elles n’ont qu’un seul enfant. À configuration sociale donnée, le taux d’activité des immigrées est plus faible que celui des femmes ni immigrées ni descendantes d’immigrés :

  • 42 % des femmes immigrées entre 25 et 49 ans ayant deux enfants dont au moins un de moins de trois ans sont actives, soit deux fois moins que les femmes dans la même situation mais sans ascendance migratoire directe (84 %). Les descendantes d’immigrés se trouvent dans une situation intermédiaire (72 %).

Pour les hommes, les variations selon le pays d’origine sont modérées. Entre 25 et 49 ans, le taux d’activité des hommes immigrés ou descendants d’immigrés originaires d’Europe est proche de celui des hommes sans ascendance migratoire directe (93 %). C’est le cas aussi pour les immigrés originaires de Turquie ou du Moyen-Orient.

  • Pour les immigrés et descendants d’immigrés venus des autres régions du monde, le taux d’activité est inférieur, en particulier pour ceux venus d’Amérique ou d’Océanie.
  • Pour les femmes, le taux d’activité varie fortement selon le pays d’origine. Les femmes de 25 à 49 ans venues de Turquie ou du Moyen-Orient ont un taux d’activité presque deux fois plus faible que celui des femmes sans ascendance migratoire directe (45 % contre 88 %). Les immigrées venues du Maghreb sont aussi parmi les moins actives entre 25 et 49 ans (54 %).
  • Le taux d’activité des descendantes d’immigrés venus d’Europe se situe au même niveau que celui des femmes sans ascendance migratoire directe (88 %) mais celui des descendantes d’immigrés d’Afrique reste en deçà (74 %).

En 2021, le salaire net mensuel médian des immigrés âgés de 15 à 74 ans travaillant à temps complet s’élève à 1 700 euros. Il est inférieur de 6 % à celui de leurs homologues descendants d’immigrés (1 810 euros) et de 11 % à celui des personnes sans ascendance migratoire directe (1 900 euros). Le niveau de salaire des personnes ayant un lien à la migration et travaillant à temps complet varie selon leur origine géographique :

  • Le salaire net mensuel médian des immigrés originaires d’Afrique (1 600 euros) est inférieur de 16 % à celui des immigrés venus d’Europe (1 900 euros). Cela s’explique en partie par les emplois occupés.
  • Les descendants d’immigrés africains perçoivent un salaire net mensuel médian de 1 740 euros, inférieur de 12 % à celui de leurs homologues d’origine européenne (1 980 euros).
  • Parmi les salariés âgés de 25 à 49 ans travaillant à temps complet, les immigrés perçoivent un salaire net mensuel médian inférieur de 5 % à celui des descendants d’immigrés et de 9 % à celui des personnes sans ascendance migratoire directe ; parmi les 50-74 ans ces écarts sont respectivement de 15 % et 19 %.

Accédant moins fréquemment aux emplois les plus qualifiés, les femmes âgées de 15 à 74 ans travaillant à temps complet perçoivent un salaire net mensuel médian inférieur de 10 % à celui de leurs homologues masculins.

La dispersion des salaires des personnes travaillant à temps complet augmente avec le niveau de diplôme. Elle est plus élevée pour les cadres que pour les ouvriers.

  • Les cadres immigrés travaillant à temps complet perçoivent un salaire net mensuel médian supérieur de 7 % à celui de leurs homologues descendants d’immigrés et de 3 % à celui des personnes sans ascendance migratoire directe.
  • Pour tous les autres groupes socioprofessionnels, les immigrés perçoivent un salaire net mensuel médian inférieur à celui des descendants d’immigrés ou des personnes sans ascendance migratoire.

En 2019-2020, parmi les salariés de 18 à 59 ans, les immigrés sont moins nombreux à déclarer avoir eu une promotion dans leur emploi actuel au cours des cinq dernières années (22 % en ont bénéficié contre 29 % des descendants d’immigrés et 34 % de la population ni immigrée ni descendante d’immigrés).

Le premier lieu d’expérience de discriminations est, de loin, le marché du travail, que ce soit sur le lieu de travail ou dans la recherche d’un emploi. Les immigrés et descendants d’immigrés se déclarent plus souvent en situation de déclassement et ce sentiment est accru parmi ceux qui sont sans emploi. Le deuxième contexte de discriminations le plus souvent cité est l’interaction avec des administrations ou des services publics mais leur confiance en l’école reste très importante (87 %). Ils déclarent rarement avoir eu des discriminations à l’école au cours de leurs études ou de leur formation (10 %).


Références