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Quelques éléments issus de récents accords de télétravail

mercredi 23 septembre 2020

Suite au développement du travail à domicile pendant le confinement et au souhait de nombreux salariés de pouvoir télétravailler depuis le déconfinement de mai, un certain nombre d’entreprises ont sans attendre négocié et signé les premiers accords d’envergure nouvelle, et beaucoup d’autres sont en pleine négociation. Les cinq accords récents étudiés sont de 2 types selon qu’ils relaient des accords précédents sur le sujet ou qu’ils sont nouveaux dans le dialogue social des entreprises. De nombreux points y sont abordés.

Les accords élargissent l’accès au télétravail

Les accords qui renouvellent des accords antérieurs ouvrent tous davantage les possibilités de télétravail que leurs prédécesseurs. La CNP Assurances enlève les conditions d’ancienneté, de statut, de classification. La Maif fait sauter la nécessité de 2 ans d’ancienneté au profit d’une intégration suffisante dans le collectif de travail (3 à 6 mois). Framatome ouvre beaucoup également les possibilités d’accès à tout CDI après période d’essai ou CDD de plus de 6 mois. Les accords originels sont sur la même ligne, Mgen et N’Vie pour les salariés à temps plein ou au moins à 80 %, excluant seulement les apprentis et autres alternants et donnant aussi le critère de maîtrise du poste et d’autonomie suffisantes pour travailler à distance.

Ces accords rendent possibles plusieurs jours de télétravail régulier par semaine, ou un stock annuel : jusqu’à 2 jours par semaine chez N’Vie, jusqu’à 3 jours à la CNP, à la Maif, chez Framatome ou à la Mgen qui crée en même temps un stock maximum de 90 jours par an, tout en mettant parfois des quotas maximaux pour l’entreprise (50 % chez N’Vie, quotas fixés selon les activités des services à la Maif…) ou des critères de priorité comme à la Mgen. Framatome explicite même que ces jours peuvent être fixes, ou variables, ou un mélange des 2.

Ces accords ouvrent aussi le plus souvent une possibilité de télétravail ponctuel, 1 fois par trimestre à la CNP, en cas de circonstances exceptionnelles à la MGEN ou chez N’Vie ; Framatome distingue en plus du « télétravail habituel » 2 formes de télétravail ponctuel « pour motif individuel » avec 15 jours possibles par an, ou « pour motif collectif » pour une situation inhabituelle ou d’urgence, déclenché alors par la direction.

De toute façon, une présence sur site au moins 2 jours, voire 3 selon les accords, par semaine reste la règle, et la Mgen précise même que ce seront des jours communs, pour permettre les réunions et les moments de partage et de convivialité.

Les processus d’ouverture et de suivi

Les accords rentrent tous dans le principe du volontariat des salariés. Ce sont eux qui demandent à télétravailler, sauf circonstance exceptionnelle telle que le covid cette année. Et ce pour les métiers qui peuvent s’exercer à distance. Et certains accords précisent qu’une attestation d’assurance habitation couvrant la présence de la personne pour motif professionnel au domicile et une attestation de conformité électrique, voire numérique, devront être fournies par les demandeurs. Ils prévoient tous un système de demande préalable, avec un délai variable de réponse pour le supérieur ou la DRH : 15 jours à la Mgen, 30 jours chez N’vie par exemple. Framatome prévoit un entretien avec le demandeur avant le démarrage de son télétravail, puis un premier bilan au bout de 3 mois.

Les accords prévoient la réversibilité du télétravail, à la demande du salarié ou de la hiérarchie. Les 2 accords originels de MGEN et N’Vie ainsi que celui de Framatome précisent que les 3 premiers mois de télétravail représentent une période d’adaptation au bout de laquelle la réversibilité sera une possibilité. N’Vie prévoit un bilan tous les 6 mois et que la réversibilité peut aussi exister à tout moment à la demande du salarié ou que le supérieur hiérarchique peut en suspendre l’application pour une période de 6 mois maximum.


Le temps de travail des télétravailleurs

C’est une question toujours sensible. Les accords affirment que le temps de travail doit être le temps de travail normal du salarié dans l’entreprise sans dépassement, rappellent aussi les règles des maxima légaux de durée quotidienne (10 heures) et hebdomadaire (48 heures et 44 heures sur 12 semaines consécutives).

N’vie précise que les salariés en télétravail doivent indiquer sur le logiciel de gestion des temps leurs heures de début et fin de télétravail. À la Mgen il s’agit d’un badgeage à distance à partir de l’ordinateur. Pour Framatome, pas de contrôle du temps de travail au profit d’un fonctionnement sur la confiance mais ils doivent être joignables sur des « plages fixes et le cas échéant variables » et, pour les salariés en forfait jours, une « plage de joignabilité limitée à la nécessité pour le salarié de bénéficier de son repos quotidien et hebdomadaire », sachant que « les heures supplémentaires ne sont pas autorisées en télétravail ou travail à distance ponctuel ».

La plupart de ces accords réaffirment le droit à la déconnexion et abordent aussi la question de la charge de travail, pour que son niveau soit vérifié et maitrisé et que, en cas contraire, une régulation soit trouvée avec le supérieur immédiatement chez N’Vie, au moins lors de l’entretien annuel à la Mgen et à Framatome mais aussi par des échanges réguliers y est-il précisé…).



Lieu de travail, équipement et frais du télétravail

Le plus souvent le lieu de travail prévu est le domicile, à condition qu’il soit adapté au télétravail chez N’Vie mais il peut être dans « tout autre lieu conforme » pour N’Vie ou, à la Maif, s’il est différent du domicile il faut en avertir préalablement.

Ces 5 accords, même si ce n’est pas obligatoire dans la législation, prévoient la fourniture de l’ordinateur portable, voire le téléphone, un 2ème écran et un casque audio chez Framatome et la Mgen demande même de ne pas utiliser son ordinateur personnel.

Une certaine prise en charge des frais de fonctionnement (connexion internet, électricité…) est prévue, avec des niveaux différents selon les entreprises :

CNP Assurances 100 € bruts à la 1ère inscription au télétravail
15 € / mois par jour télétravaillé hebdomadaire
N’Vie 10 € / mois pour 2 jours par semaine
Maif 2 € nets / mois par jour travaillé
Mgen 15 € / mois si télétravail réalisé
Framatome 10 € / mois si 4 jours télétravaillés dans le mois avec plafond 100 € / an

On voit ainsi, par ces quelques exemples, que le télétravail commence à s’organiser ou à se réorganiser dans un certain nombre d’entreprises à la suite de son usage intensif par toutes pendant le confinement. Mais ce n’est encore que le début d’un mouvement, dans trop d’entreprises jusque-là le télétravail n’existait pas, ou ses règles avaient fait l’objet d’une simple charte élaborée par l’employeur (avec avis du CSE s’il y en a un). Il y a donc là tout un champ de négociation pour les syndicats et délégués syndicaux afin que le développement du télétravail, souhaité par la majorité des salariés et mieux intégré par les directions d’entreprise depuis son déroulement au printemps, puisse s’organiser de façon durable, maitrisée, enrichie par l’apport de tous les acteurs lors de la négociation. Et il est d’autant plus important qu’une négociation nationale vienne donner des lignes directrices afin que les négociations d’entreprise traitent de façon cohérente toutes les questions que soulève le télétravail.

Les 5 accords télétravail étudiés

Renouvellement d’accords antérieurs
 CNP Assurances, nouvel accord QVT du 22 juillet 2020 incluant le télétravail
 Maif, avenant du 16 juillet 2020 à l’accord « Oser » de 2017
 Framatome, nouvel accord ouvert à la signature 30 juillet-19 août 2020

Accords nouveaux
 Mgen, Protocole d’accord du 24 avril 2020
 N’Vie pôle HLM (sociétés anonymes HLM de Douai, 188 salariés), accord du 8 juillet 2020


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